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De la phrase au texte et du coupon de tissu au prêt à porter

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Tayeb Zaid

Les similitudes entre le maçon, la couturière et l’écrivain me semblent nombreuses à tel point qu’elles se chevauchent ou se confondent, dans ma tête, du moins, qui les voit sous cette forme ! Je ne cesse de voir en chacun d’eux un artisan en train d’accomplir son ouvrage avec les outils qui conviennent à l’exercice du métier. Je vois les uns et les autres, chacun dans son chantier à édifier, coudre ou écrire avec une plume, une aiguille ou une truelle. J’ai déjà parlé des points de ressemblance entre le maçon et l’écrivain et sur lesquels je ne reviendrai pas. Je parlerai dans ce qui va suivre de ceux qui existent entre la couturière et l’écrivain. J’ai toujours pensé que ce qui peut flotter de fumeux et de flottant dans l’esprit peut prendre une forme matérielle, observable et exportable et de personnel devenir collectif. L’idée demeurera une idée tant qu’elle ne quittera pas la tête où elle a germé et où elle est demeurée prisonnière pour se concrétiser en une œuvre matérielle que les autres pourront considérer de leur regard et (en) saluer la majesté de l’œuvre et de l’ouvrier.

Il en est donc de la couturière ce qui en est de l’écrivain.

La nature du tissu détermine le type de vêtement à confectionner : tel tissu pour tel type de vêtement, tel autre pour telle saison, tel autre est pour les femmes alors que tel autre est pour les hommes, celui-ci est pour les fêtes et les sorties alors que celui-là est pour le lit…. Beaucoup d’autres facteurs peuvent contribuer au choix du tissu.

La couturière reçoit de sa cliente le coupon. Elle le déplie sur une longue table, le palpe avec les doigts, l’assouplit en passant le plat de la main sur l’étoffe, le tourne et le retourne à la recherche de la lisière, prend les mesures de la cliente, le découpe en pièces selon un patron ( manches, col, poches, cotés, devant, derrière, épaules…), assemble les différentes parties les unes avec les autres au fil et à l’aiguille au moyen d’un faux filage, coud l’ensemble à la machine. C’est d’apparence un manteau d’hiver. La cliente revient quelques jours plus tard pour un premier puis pour un second essayage. La couturière effectue quelques petites retouches avant de lui remettre ce qui est un superbe manteau de femme.

Ainsi en est-il de la ressemblance entre le manteau de la couturière et le sujet de rédaction d’un élève. A la différence près que l’élève travaille sur un sujet argumentatif, dans notre cas, par exemple, alors que la couturière sur une étoffe. Il le lit et le relit pour en reconnaitre les limites, dégage une introduction qui doit poser le problème et annoncer le plan, met sur pied une thèse et une antithèse appuyées l’une et l’autre par la collecte d’un certain nombre d’arguments et une conclusion sous la forme d’un point de vue personnel ou d’une synthèse. Il assemble l’introduction, la thèse, l’antithèse, le point de vue personnel ou la synthèse avec des connecteurs logiques pour obtenir en fin de compte une belle rédaction à structure complexe.

La correspondance entre le travail de la couturière et celui de l’élève est parfaite. Au coupon de tissu correspond l’énoncé du sujet. A sa coupe en manches, poches, épaules, col, côtés, devant, derrière, au moyen d’une aiguille et du fil et l’assemblage des différentes pièces en un manteau, correspond la décomposition de l’énoncé du sujet en introduction, un développement avec une thèse, une antithèse et une batterie d’arguments pour chacune et une conclusion. Il assemble le tout au moyen de connecteurs logiques. Le résultat final est un joli manteau dans le cas de la couturière et un beau texte dans celui de l’élève.

Le rapprochement entre le travail de l’élève dans le traitement d’un sujet de rédaction, quel qu’en soit le genre ou le type me parait ne pas être bien différent de celui du maçon et de la couturière. Tous les trois se livrent à un exercice d’assemblage pour réaliser une œuvre sublime. Seul le matériau et les moyens d’assemblage changent.

Tayeb Zaid

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