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Les miracles de la société civile : l’exemple de la Marche Verte 1975

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Onze nationalités (Afrique, Maghreb, Europe, Golf) et plusieurs dizaines de participants, universitaires, étudiants, mères au foyer et femmes chefs d’entreprise, cadres associatifs, poétesse et artistes, ont commémoré ensemble, ce Samedi 8 novembre, le 39ème anniversaire de la Marche Verte.

 

Cette communion autour de la commémoration d’un événement national, la Marche Verte de 1975, conforte, si besoin est,  l’idée qu’une cause juste, défendue avec force de conviction et abnégation, triomphe toujours.

 

C’est ce fil conducteur que la rencontre-débat organisée dans le cadre des « Rencontres Culturelles d’Almohagir », à Boulogne Billancourt (92), emprunte pour montrer avec quelle force et impact les citoyens (ou la société civile) sont capables d’accomplir des « miracles » pour changer le cours des événements et donner à leur destin collectif une meilleure trajectoire.

 

En effet, lorsque le peuple Allemand (de l’Est), décida, il y a vingt cinq ans, de sortir de sa torpeur, qui dura plus de quatre décennies, le mur de Berlin est tombé et avec lui un régime de terreur de nature stalinienne. Lorsque les peuples Tunisien, libyen, Egyptien, Burkinabais, longtemps maintenus dans la peur et la misère, décident de « briser les chaines », de la servitude, ils réussissent l’inattendu et s’affranchissent de l’emprise de la dictature. Certes, la construction de l’Etat de droit n’est jamais un fleuve tranquille et la bataille de l’égalité économique et sociale n’est pas une mince gageure. Elles impliquent sacrifices et souffrances et, surtout, demandent, pour leur accomplissement, une volonté à toutes épreuves. Mais, ces sacrifices méritent d’être faits pour que la justice et les causes légitimes triomphent.

 

Lorsque le peuple marocain est sollicité en novembre 1975 par son Roi (Feu Hassan II) pour libérer une terre marocaine du joug colonial espagnol, il se met en marche, fièrement et en rangs serrés, défiant les contraintes du temps, de l’espace  et de la distance. Au bout de sa Marche victorieuse une partie du territoire national, qui avait assuré, de tout temps, cette continuité historique, culturelle et filiale qui liait le Maroc à l’Afrique, est retournée au giron de la mère-patrie. Aujourd’hui, elle connait un autre « miracle », celui du développement économique et social.

 

La Marche Verte de 1975 est plus qu’une réussite stratégique et une idée de génie. C’est une épopée nationale rendue possible par la rencontre de deux volontés trempées dans l’acier ; celle d’une monarchie chérifienne et celle d’un peuple héritier d’une civilisation ancestrale. Si l’occupant espagnol et le voisin algérien, envieux et belliqueux, furent surpris par l’ampleur et la portée de cette épopée nationale, le peuple marocain n’a fait, en foulant le sol de son Sahara, qu’écrire un nouveau chapitre glorieux d’une longue histoire nationale.

 

Ce sont ces miracles, le fait d’hommes et de femmes modestes et vaillants,  que la conférence du 8 novembre, organisée par l’association Almohagir, a voulu mettre en exergue avec pragmatisme et pédagogie. L’exposé du président (Mr Cissokho Bakari) d’une association sénégalaise,  la DSP (Association Pour le Progrès des Ressortissants de Dembancané), a montré ce qu’une action citoyenne de solidarité, animée par un esprit de justice, portée par la société civile, a d’humain et d’essentiel. C’est une poignée de sénégalais solidaires et déterminés qui s’est donnée pour but de sauver des vies humaines en désenclavant un village et en le dotant d’un dispensaire avec une maternité. Cette volonté de servir ses semblables, de servir l’intérêt collectif,  apparaissait dans sa grandeur dans les propos de la présidente (AWA Ba) de l’association Nationale des Femmes Africaines (ANFA)) et de maliens, qui assistaient à la conférence, dont le récit donnait au slogan de la conférence, « Servir une cause, et non pas se servir  d’une cause », toute sa valeur citoyenne.

 

Le témoignage d’un participant à la Marche Verte a mis l’assistance dans le contexte de l’époque. C’est l’itinéraire d’un jeune immigré marocain (un MRE) qui répond à l’appel de son Roi, quitte son travail et ses proches et part (de France) rejoindre les 350 000 volontaires qui, le Coran et le drapeau à la main, au rythme des prières et de l’hymne national, bravant les épreuves, partent retrouver une terre marocaine si chère à leur cœur. Les « drapeaux n’étaient pas seulement dans nos mains, ils étaient dans nos cœurs », disait avec émotion M. Lahoussine. Boutebaa.

 

Entrecoupés de poèmes (œuvre de Fatima Chbibane-Bennaçar), les images, les explications et les témoignages sur la genèse, la préparation et le déroulement de la Marche Verte, ont révélé des souvenirs et suscité des mots sincères qui en disent long sur ce que la fierté d’être marocain a de grand et de profond.

 

Une jeune femme marocaine qui n’a connu ni Feu Hassan II ni la Marche Verte a fondu en remerciements pour lui avoir donné l’opportunité de connaître ce chapitre glorieux de l’histoire de son pays. Une autre exhibe fièrement en souvenir  une vieille bosse à la tête reçue à la gare de Rabat, le jour du départ des volontaires vers le Sud en novembre 1975. D’autres ont suggéré au conférencier de multiplier ces moments de rencontre et d’échanges pour que l’histoire de la Marche Verte soit mieux connue par les jeunes générations.

L’échange entre un marocain (Lakhdar Kadaoui), expulsé d’Algérie en 1975, parce qu’il était marocain et en guise de réaction à la Marche Verte, et une citoyenne algérienne,  a donné au débat une dimension particulière. La fraternité et l’hommage sincère rendu à ces milliers de familles (plus de 45000) chassées manu militari de leurs maisons et qui ont vu leurs biens (commerces, logements, terres, biens mobiliers) spoliés et leurs familles déchirées, parce qu’elles étaient  marocaines.

 

Ce sont ces témoignages vivants qui éclairent l’historien. Ils donnent à l’action citoyenne son vrai sens et à la conférence sa raison d’être. Ce sont ces volontés sincères et ces engagements patriotes qui permettent aux miracles (lutte pour la liberté et la justice et bataille pour le développement humain) de se réaliser. La Marche Verte en est un des exemples.

 

Aujourd’hui, le devoir de tout marocain est de favoriser son souvenir, de défendre ses acquis bec et ongles. Car, incontestablement « le Sahara est une question d’existence et non une question de frontières » (discours royal du 6 novembre 2014). Qu’on le dise, partout, haut et fort et fièrement.

Dr Mohammed MRAIZIKA

(Chercheur en Sciences Sociales, Consultant en Ingénierie Culturelle)

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