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Le drame d’un mouvement migratoire humain : quelles solutions ?et quel avenir ?

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Le drame d’un mouvement migratoire humain :
quelles solutions ?et quel avenir ?

A un moment où je rédige le présent article, j’ai eu l’information que le  10 juillet 2012, à Melilla, un soldat Marocain a été tué par des migrants subsahariens. Il a fallu une tragédie pour révéler  l’existence d’un phénomène dénommé  « la migration subsaharienne ». Quelques jours plus tard, on en parle plus « stop talking and no comment ». Malgré l’ampleur et la dangerosité du problème transgressif des subsahariens au Maroc, le phénomène reste toujours sous estimé, négligé, si ce n’est ignoré, aussi bien par les décideurs politiques que les masses médias.
Les organismes humanitaires, nationaux et internationaux ont prêté attention à cette crise humanitaire, un phénomène social aussi vaste et aussi marquant qu’il l’est aujourd’hui. En effet, l’Institut Panos Paris « IPP », dans sa deuxième édition au Maroc, en partenariat avec la Fondation Occident Orient « FOO », la coopération suisse, a organisé un atelier sur le journalisme et la migration, dédiées aux journalistes Marocain et  Africains encadrés par des experts venus d’Europe. L’objectif  de cette formation vise à outiller les journalistes pour couvrir, comme il se doit, un événement majeur qui risque d’avoir un impact désastreux sur la société Marocaine. Le choix judicieux de la ville d’Oujda est justifié par le fait que la ville en question occupe une position stratégique du fait de sa proximité des frontières Marocco-Algerienne, elle est donc la principale porte d’entrée des migrants subsahariens en destination de l’Europe. Cette ville est considérée comme le fief de cette masse populaire en situation irrégulière, avec une population qui est de l’ordre de 1000 personnes, selon le Réseau de l’Oriental de Migration de Transit « ROMT ». Un chiffre en fluctuation perpétuelle à cause de l’instabilité et le mouvement de ces personnes, pourchassés en permanence par les services de l’ordre Marocain.
A travers cet article, nous espérons donner un schéma simplifié de ce phénomène social en vue de tenter d’expliquer la migration et en saisir la complexité du phénomène. Notre objectif global, est de pouvoir alimenter l’opinion publique et les décideurs politiques par des informations réelles et objectives relatives à la question. De cette manière, notre contribution pourra, éventuellement, aider à la réorientation de  l’axe dominant connaissances/pouvoir vers une bonne gouvernance d’une telle situation.
Notre approche est basée sur des entretiens directs avec des migrants subsahariens et la population locale, l’accent a été mis sur deux points essentiels : la situation vécue des migrants subsahariens en situation irrégulière et la perception du phénomène par la population locale.

La situation vécue des migrants subsahariens en situation irrégulière :
C’est un drame, que vivent ces Africains en Afrique. Comme il l’a témoigné un Nigérien de 27 ans, qui a pour seul domicile, la forêt de Sidi Maafa : quand on est de couleur, on est catalogué et par conséquent on est privé de tous nos droits élémentaires : de travailler, de prendre un taxi ( même si on a de quoi payer), pour se déplacer ( pour ne pas dire voyager) à Rabat, on  est systématiquement contrôlé, il faut avoir le billet du transport et la carte d’identité  ou de séjours. Même quand on demande la charité on est tout le temps pourchassé par les forces de l’ordre.
Quant au Gambien de 26 ans qui nous a déclaré : nous sommes terrorisés quotidiennement dans notre sommeil par les descentes fréquentes des forces de l’ordre à une période bien choisis (entre 4 et 5 heures du matin). Ils nous confisquent tous nos biens, ajoute-t- il, regardez, c’est mon sixième téléphone portable que je viens d’acheter.
Au feu rouge d’un carrefour, la Ghanéenne de 25 ans qui nous a reçu avec un sourire radieux, elle n’avait pas peur de se faire attraper et reconduite aux frontières, car elle avait sa carte de séjour, à durée limitée (un bébé de 1 an sur le dos). Elle connait très bien ses droits. Avec un bébé on nous laisse en paix au moins jusqu’à un certain âge de l’enfant. Mais elle nous a tout de même livré ses malheurs et ses souffrances. J’ai accouché de ce bébé dans une forêt, dit elle, imaginez la suite. Elle a ajouté, la seule chose qui me fait peur c’est l’harcèlement sexuel par les forces de l’ordre
Arnold le jeune Camerounais de 28 ans qui est toujours décidé et déterminé d’accéder à l’autre rive. J’ai été refoulé 8 fois aux frontières Marocco-Algérienne, disait-il,  et à chaque fois je remets le compteur à zéro et je redémarre pour une nouvelle tentative. Pour moi c’est une question de temps et d’argent, une fois que j’aie  mes 150 Euros, la traversée vers l’eldorado est assurée.
Pour le Tchadien âgé de 23 ans qui nous a déclaré que la population est accueillante compatissante, elle nous aide beaucoup, sauf que les services de l’ordre qui nous terrorisent et nous harcèlent, il ajoute : «  je me suis fait arrêté à Fès (ville à 330 km à l’Ouest d’Oujda), ils m’ont confisqué mon argent mon téléphone portable et ils m’ont gardé pendant 3 jours au commissariat de police, avec un menu du jour une galette de pain et un demi litre de lait. Après mon séjour à l’hôtel de police, j’ai été refoulé aux frontières algériennes, plus exactement dans un coin perdu «  Laaleb à 12 km d’Oujda » le même jours, je suis retourné à Oujda et je me suis installé à la Faculté de droit de l’université Mohammed premier en payant, bien sûr,  à mes compatriotes, la somme de  500 dirhams (45 euro) comme droits pour accéder à cet espace.

La perception du phénomène par la population locale :
La masse des migrants dans cette ville frontalière est devenue visible et perceptible par la société Oujdie. En effet, la totalité des déclarations recueillies auprès de la population locale convergent vers une visibilité du phénomène (migrants subsahariens) référenciée par la couleur de la peau,  la  physionomie et l’aspect vestimentaire des ces personnes, le comportement de cette population,  Ils se déplacent le plus souvent en groupe de trois, quatre ou cinq. Ils sont omniprésents dans des endroits bien précis (à la sortie des mosquées, dans les cimetières, dans les marchés et les souks aux carrefours « feux rouges », ils demandent la charité.
La majorité de la population locale est compatissante envers ces immigrants sans papier, en conformité avec la culture musulmane, c’est dicté dans le coran, pour certains,  il faut aider le passager (عابر السبيل).
Pour Mostafa, professeur retraité, bien qu’il est musulman pratiquant, il est contre la présence de ces migrants dans la société marocaine. Si j’ai à donner de la charité, dit il,  il faut commencer par les plus proches, c’est-à-dire, la famille, les voisins ensuite les autres. Et comme on a assez de pauvres dans notre entourage il est évident que mes dirhams n’arriveront jamais aux mains de ces subsahariens qui sont pour mois des intrus.
Selon un haut responsable dans l’administration marocaine : Je trouve scandaleux que des personnes en situation irrégulière puissent accéder à une institution et squatter un lieu public, le campus universitaire, et de ce fait, peuvent violer les lois  des institutions et aussi porter atteinte à la sécurité et la dignité de la masse estudiantine.
Les déclarations précitées soulèvent d’importantes questions, sur l’évolution de cette calamité et le devenir d’une population subsaharienne complètement déboussolée.
Au cours de ces dernières  décennies, le monde a connu une migration particulière communément qualifiée de clandestine. Cette migration irrégulière ou clandestine est définie au sens large comme étant « un mouvement international ou un séjour en conflit avec les lois sur la migration ». Globalement, le problème migratoire  a connu, ces dernières décennies, une extension planétaire très importante, en effet,   le nombre des migrants dans le monde a atteint la valeur de 214 Millions. A titre comparatif, le nombre des subsahariens au Maroc est de l’ordre de 10000 migrants tous candidats à l’immigration pour l’autre rive, mais qui se trouvent  acculé à un séjour forcé au Maroc. Une migration subsaharienne, vouées à la clandestinité, devenue plus visible et plus menaçante pour le Maroc.  Le problème s’est exacerbé depuis que les pays cibles à l’immigration ont érigés des barrières administratives et physiques, afin d’empêcher l’accès de ces migrants aux sols de  l’Union Européenne. Ces pays cibles ont tout fait pour arrêter cette transgression massive d’une population venue de la région subsaharienne. Progressivement, ils ont installé des barrières au niveau des frontières sud du continent européen. Dès l’année 1999 les pays concernés ont instauré le système de visa d’entrée en Europe. Ils ont trouvé ces mesures insuffisantes, et du coup, ils ont installé sur les frontières sud de l’Europe, des équipes d’intervention rapide aux frontières «  Frontex » (créée en 2004). En vue de coordonner les opérations de management des frontières sud, les responsables européens ont inséré les pays Africains, (pour leur mettre la main dans la patte) dan le processus  restrictive, de ce fait, une Conférence ministérielle euro-africaine a eu lieu en juillet 2006 à Rabat (Maroc) et  qui s’est soldé par des décisions répressives :  le renforcement total du contrôle des frontières par les forces de l’air, les forces navales et la police (Afrique comprise), les accords de réadmission entre les pays cibles, les pays de transit et ceux d’origine. C’est une politique, de perspective eurocentriste, tournée vers une externalisation du problème migratoire, de façon à ce que le Maroc, tamponne la situation et servira comme guichet européen, portail de l’immigration, centre de transit ou même un gendarme de l’Europe. Les conséquences de cette politique sont lourdes, tout d’abord pour les migrants subsahariens qui vivent une tragédie humaine et aussi pour la société Marocaine qui est touché de très près. En effet, des indicateurs de cette crise humanitaire sont déjà présents dans la société Marocaine, formation des ghettos, où on retrouve toute forme de promiscuité, de ventes illicites des drogues  et  la diversification des réseaux des malfaiteurs.
Tous les pays devront prêter soigneusement attention aux changements sociaux qui accompagnent les mouvements migratoires, c’est pourquoi, il faut bien comprendre l’enjeu du problème et disposé des connaissances approfondies pour mieux gérer cette entreprise. Sous forme d’un schéma simplifié (ci dessous), nous avons tenté de décrypter ce système hypercomplexe et d’identifier les principaux acteurs intervenant directement ou indirectement dans la résolution de cette équation.
La gouvernance des migrations subsahariennes au Maroc  est dispersée entre de multiples institutions, contradictoires. D’un coté, il y a ceux qui ont adopté l’approche humanitaire, en vue d’assister et d’apporter de l’aide aux migrants subsaharien, comme c’est le cas du comité d’entraide international (CEI), de  l Association Marocaine d’Etude et de recherche sur les Migrations (AMERM),  l’ Organisation Internationale pour les Migrations (OIM), du Haut commissariat pour les réfugiés (HCR), l ’Association Marocaine des Droits de l’Homme (AMDH), de Médecins sans frontières (MSF)
de l’Organisation Marocaine des Droits de l’Homme (OMDH) et du Groupe Antiraciste d’accompagnement et de Défense des Etrangers et des Migrants (GADEM) et toutes les autres instances internationales, de l’autre coté ceux qui ont opté pour le sécuritaire, à fin d’établir l’ordre et d’assurer la sécurité dans la région comme c’est le cas de la gendarmerie royale, la police nationale, les militaires et les forces auxiliaires.
Deux approches diamétralement opposées (la carotte et le bâton). Est-ce  la bonne solution ? bien sûr que non, surtout quand on sait que le flux sortant, des migrants subsahariens refoulés aux frontières algériennes, est nettement inférieur à celui entrant ( immigrés renvoyés au frontières et qui font demi tour au Maroc,  additionné de nouveaux arrivés venant du campement de Marhnia (à quelques kilomètre de la frontière Marocco-Algérienne) qui abrite plus que 3000 subsahariens en attente pour entrer au Maroc.
Avec un tel déséquilibre entre les flux migratoires entrant et sortant, ainsi que l’étanchéité de la barrière frontalière au sud de l’Europe, le processus migratoire des migrants subsahariens dans la région ne peut que s’exacerber et impacter négativement sur la région.
Pour trouver une issue à cet impasse, tous ensemble, les décideurs politiques, les sociétés civiles et les différentes institutions seront sensées de coordonner leurs efforts d’une façon synergique.
Ce qui est inquiétant dans cette histoire, c’est que, au Maroc, la thématique migratoire n’a jamais été un débat public et politique, le sujet est rarement abordé par les médias Marocains, la question n’a jamais été soulevée par nos parlementaires et pourtant, le problème est de taille. On se demande, pourquoi ce silence à propos d’un problème aussi dramatique ? Est-ce une fuite à l’avant ? ou une politique de l’autruche ? That’s the question
En tant que journalistes, notre contribution se limite à l’information voire la sensibilisation aussi bien pour le grand publique que les décideurs politiques et les responsables dans la matière.

ELACHOURI Mostafa
Email :@elachouripresse@gmail.com

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