Essaouira célèbre le Traitillisme : quand l’art marocain trace une nouvelle mémoire

Écrit par: Said Ouedghiri
Du 14 au 18 mai 2025, la ville d’Essaouira se transforme en haut lieu de création contemporaine à l’occasion de la 3ᵉ exposition du Traitillisme, premier mouvement plastique marocain. Organisé dans l’enceinte mythique du Borj Bab Marrakech, cet événement réunit artistes, chercheurs et passionnés autour d’une question essentielle : comment réinterpréter notre patrimoine à travers le trait ?
Le Traitillisme : une école marocaine du trait
Né d’une volonté de faire émerger une esthétique plastique proprement marocaine, le Traitillisme s’impose comme un courant audacieux, où le trait n’est plus un simple contour mais un geste porteur de sens, de mémoire et d’émotion. À la croisée de l’abstraction et de l’enracinement culturel, les œuvres présentées dans cette exposition revisitent les formes de l’héritage marocain — zelliges, arabesques, paysages, figures — à travers une écriture picturale libre et sensible.
Afif Bennani, invité d’honneur : une conférence très attendue
Le temps fort de cette manifestation sera sans nul doute la conférence du grand plasticien Afif Bennani, prévue en ouverture de l’exposition. Artiste, penseur et pédagogue, Bennani est l’un des piliers de l’art contemporain au Maroc. Son intervention sur le thème « La trace et la mémoire » s’annonce comme un moment d’exception : il y explorera le rôle de l’artiste dans la réactivation des formes traditionnelles à travers des langages plastiques actuels.
Pour Bennani, l’art ne doit pas figer la tradition, mais la faire respirer autrement, à travers des gestes neufs, des approches critiques et des matériaux hybrides. Sa parole, précise et généreuse, promet de nourrir le débat autour de la place de l’artiste marocain dans un monde globalisé.
Sidi Mohammed Chiadmi : le trait comme héritage vivant
Autre moment fort : la participation du peintre Sidi Mohammed Chiadmi, dont la présence à Essaouira symbolise la rencontre entre l’art savant et l’art populaire. Issu d’une famille de maîtres-artisans, Chiadmi s’est forgé un style singulier où la Tazouakt traditionnelle dialogue avec des techniques contemporaines.
Ses œuvres, entre bois peint, géométrie sacrée et abstraction rythmée, incarnent une passerelle vivante entre les médersas d’antan et les galeries d’aujourd’hui. Il présentera une série inédite de panneaux, véritable hommage au patrimoine fassi revisité à la lumière du Traitillisme.
Essaouira, ville manifeste
Plus qu’un décor, Essaouira est un manifeste en elle-même. Carrefour d’influences, elle incarne l’ouverture, la mémoire partagée et la circulation des formes. Le choix du Borj Bab Marrakech, forteresse transformée en lieu d’art, est hautement symbolique : c’est l’histoire qui accueille la création, la pierre qui accueille le trait.
Durant cinq jours, la ville vibrera au rythme des couleurs, des conférences, des échanges, des regards croisés. Le Traitillisme ne se contente pas d’exposer, il propose une autre façon de voir et de faire vivre le Maroc.
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