L’immersion du corps d’Oussama Ben Laden provoque la controverse
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Les autorités américaines assurent qu’elles ont respecté les rites islamiques. Des responsables musulmans s’indignent.
Le Point.fr
La dépouille d’Oussama Ben Laden, le chef d’al-Qaida tué dimanche lors d’une opération commando américaine, a été immergée pour éviter, notamment, de creuser une tombe qui serait devenue un lieu de pèlerinage, a-t-on appris, lundi, auprès de responsables américains. « L’immersion a déjà eu lieu », a déclaré un responsable américain sous le couvert de l’anonymat, confirmant une information de plusieurs médias américains. « Oui, je peux le confirmer », a dit un autre responsable gouvernemental interrogé lundi matin. Le lieu et les circonstances de cette « immersion » n’ont pas été précisés.
Selon deux autres responsables américains, le choix de l’immersion du corps avait été en partie arrêté pour éviter de laisser une tombe qui se serait transformée en lieu de pèlerinage pour les djihadistes. Un des responsables qui a voulu garder l’anonymat a dit qu’un tel endroit aurait pu devenir un haut lieu de recrutement. « Nous nous assurons que son corps est traité en accord avec la pratique et la tradition musulmanes. C’est quelque chose que nous prenons très au sérieux », avait auparavant affirmé un haut responsable américain lors d’une conférence téléphonique.
« Contraire aux règles de l’islam » (Mosquée de Paris)
Ces déclarations se sont toutefois heurtées à une sèche mise au point d’un haut responsable de la plus haute autorité de l’islam sunnite, l’institution Al-Azhar du Caire, qui a souligné que « l’islam n’accepte pas l’immersion en mer, seulement l’enterrement ». Cette règle s’impose « qu’il s’agisse d’une personne assassinée ou décédée de mort naturelle », a déclaré à l’AFP Mahmoud Azab, conseiller du grand imam Ahmad al-Tayeb pour le dialogue interreligieux. Le choix de la mer reste limité à des cas de force majeure, comme pour les personnes décédées à bord d’un navire, dont le corps présente des risques de décomposition s’il ne peut être débarqué rapidement, a-t-il souligné.
La Grande Mosquée de Paris a, quant à elle, souligné que l’immersion d’une dépouille était « totalement contraire aux règles sacro-saintes de l’islam ». Une source de l’entourage du recteur de la Grande Mosquée, Dalil Boubakeur, a indiqué que, selon la tradition musulmane, « le corps d’un défunt doit d’abord être lavé avec de l’eau savonneuse, puis de l’eau claire et enfin avec de l’eau mêlée de camphre, avant d’être entouré de trois pièces d’étoffe ». « L’inhumation se fait en terre, sans cercueil. La dépouille doit être placée parallèlement à La Mecque, la tête du défunt légèrement tournée vers la droite pour que son visage soit tourné vers la Kaaba, le sanctuaire sacré de La Mecque », a rappelé cette source.
Cérémonie à bord d’un porte-avions
Aux États-Unis, un important responsable musulman, Muzammil H. Siddiqi, s’est ému du choix de l’immersion. « Ce n’est pas une procédure normale, je ne sais pas pourquoi ils l’ont fait », a assuré le président du Fiqh Council of North America, une association qui interprète la loi islamique. Muzammil H. Siddiqi a toutefois souligné que ces divergences sur le rituel ne devaient pas occulter le fait, mis en exergue par le président Barack Obama, « qu’Oussama Ben Laden n’est pas le chef des musulmans, mais seulement le chef d’Al-Qaida, qui a fait souffrir beaucoup de musulmans ».
Le responsable d’une des principales associations musulmanes américaines a, quant à lui, affirmé que la question du sort réservé à la dépouille d’Oussama Ben Laden était un « détail anecdotique ». Nihad Awad, directeur du Conseil pour les relations américano-islamiques (CAIR), a souligné que « le plus important est que ce terroriste ait été éliminé ».
L’administration américaine a, pour sa part, assuré qu’elle n’avait pas enfreint le rituel funéraire. Le Pentagone a fait savoir qu’une cérémonie s’était déroulée à bord du porte-avions américain Carl-Vinson, en mer d’Oman, dans le respect des traditions musulmanes, avant que le corps ne soit laissé à la mer. La dépouille a été lavée, puis placée dans un linceul blanc lui-même déposé dans un sac lesté. Un officier a lu un texte religieux qu’un interprète a traduit en arabe, a fait savoir la Défense américaine.
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