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La responsabilité des Etats dans la gestion des crises

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Chabih Jilali
Professeur de droit, finances, fiscalité, et méthodes de recherche, Université Cadi Ayyad, Marrakech, Maroc

Résumé
Un Etat quelconque, développé ou en développement, est-il bien préparé pour lutter contre les calamités, catastrophes, sinistres et autres crises sanitaires ? A-t-il les moyens humains, logistiques et d’infrastructure adéquats pour la protection des personnes, des biens et de l’environnement en cas de dommages subis ? Peut-on réellement évaluer la responsabilité sociale d’un Etat lorsqu’un sinistre se produit ? Y-t-il d’autres responsables en l’occurrence ? Et la nature a-t-elle une part de responsabilité, parfois, à tout le moins, dans telle ou telle calamité ou catastrophe ? Quelle est, en définitive, la corrélation entre le coût de l’intervention publique en matière de protection et de résorption du risque et l’importance des dégâts humains, matériels ou écologiques subis ? C’est dans cette perspective, avec une modélisation en guise de conclusion, que se positionne précisément l’objet de notre recherche.

Les mots clés :
Etat, responsabilité sociale, causes des calamités, catastrophes, dégâts, dommages subis, moyens de protection, théorie de propagation

State responsibility in crisis management

Abstract
Is any state, developed or developing, well prepared to deal with calamities, disasters, and other health crises ? Does it have adequate human, logistical and infrastructure resources to protect people, property and the environment in the event of damage ? Can we really assess the social responsability of a State when a disaster occurs ? Are there other responsible people in this case ? And does nature have a share of responsibility, sometimes, at the very least, in this or that calamity or disaster ? What, ultimately, is the correlation between the cost of public intervention in terms of protection and risk reduction and the extent of the human, material or ecological damage suffered ? It is in this perspective, with modeling as a conclusion, that the object of our research is precisely positioned.

Key words :
State, social responsibility, causes of calamities, disasters, damage, damage suffered, means of protection, propagation theory

Les moyens de protection des personnes, des biens et de l’environnement et la responsabilité sociale des Etats : recherche d’une corrélation entre le coût de l’intervention publique en matière de protection et de résorption du risque et l’importance des dégâts humains, matériels ou écologiques subis

Introduction : La survenance des drames et catastrophes n’est certainement pas d’ordre exclusivement accidentel ou naturel, la main de l’homme, la main de l’Etat surtout, y est pour beaucoup, malheureusement.

Mon apport dans cette manifestation scientifique sur le « Développement durable, responsabilité sociale des organisations et performances économiques : bilan, enjeux et perspectives », consiste à soulever, du point de vue de l’objet de mes recherches, une question bien précise qui est celle de savoir, et ce de par l’intitulé de cette intervention, dans quel degré d’importance la responsabilité sociale de l’Etat est-elle engagée dans les risques, accidents, catastrophes, dégâts ou sinistres occasionnés aux personnes, aux biens ou à l’environnement d’une nation, d’une collectivité, d’une région ou d’une unité sociale données ?

Il est vrai qu’il peut y avoir dans toute collectivité, dans toute unité sociale, quelle qu’elle soit, petite ou grande, englobée ou englobante, des risques, des accidents ou catastrophes, des dégâts ou sinistres. Ces désastres, drames ou fléaux qui peuvent s’abattre sur les personnes, les biens ou l’environnement, ou sur la collectivité ou l’unité sociale dans son ensemble à la fois, car rien n’est isolé, tout est lié, tout se tient en définitive, ne sont pas forcément d’ordre naturel. La main de l’homme, héla, y est souvent pour beaucoup. La main de l’homme y a très souvent une très grande part de responsabilité. Cette responsabilité, dont l’ampleur est en corrélation très étroite avec la transversalité des dégâts, incombe, dans des proportions parfois considérables, aux pouvoirs publics eux-mêmes, à l’Etat lui-même. Que ce soit directement par sa présence, par ses propres actes, ou indirectement par son absence, par sa défaillance (en matière d’intervention ou d’arbitrage – cohésion, solidarité, de réglementation, de contrôle). J’entends l’Etat au sens large de gouvernement étranger, de pouvoir central, de collectivités locales ou d’entreprises et établissements publics et semi-publics.

La réponse à cette question de responsabilité sociale de l’Etat requiert nécessairement, au préalable, la considération des différents risques et sinistres sociaux, entrants ou sortants, les causes qui les produisent et les moyens de les prévenir ou, le cas échéant, de mieux les résorber dès lors qu’ils sont inéluctables, à l’exemple des épidémies, des séismes, des tornades, des inondations ou des sécheresses (Eau et serres dans le désert, Le Monde du 27 sept. 2008) afin de pouvoir aboutir finalement à la détermination chiffrée, à l’évaluation quantitative de cette responsabilité sociale étatique, de l’obligation sociale pour l’Etat de remplir décemment son devoir, d’assumer correctement son engagement. Ce sont précisément ces trois aspects : l’objet de ces drames et malheurs, les causes de leur production et les moyens de leur résorption que nous allons à présent développer successivement : la notion de risques, catastrophes et autres sinistres ; les causes de ces accidents, calamités et dégâts ; les moyens de prévention et de résorption de ces désastres, drames et fléaux.

I)- La notion de risques, catastrophes et autres sinistres
Il s’agira en l’occurrence d’étudier la définition de ces risques, catastrophes et sinistres, de saisir leur nature disparate et d’identifier les organes cibles victimes de leur violence.

A)- La définition de risques, catastrophes et autres sinistres
Le risque est un danger éventuel plus ou moins prévisible. Il est l’éventualité d’un événement ne dépendant pas exclusivement de la volonté des parties et pouvant causer la perte d’un objet ou tout autre dommage. La probabilité d’un événement peut être certaine, donc égale à 1, ou impossible donc égale à 0. On parle également d’événements équiprobables, c’est-à-dire des événements ayant les mêmes probabilités. Le risque est un événement contre la survenance duquel on s’assure (assurance contre les incendies, maladies, décès ou terrorisme, assurance de la production agricole contre la sécheresse). L’assurance qui couvre les risques d’accident, d’incendie ou de pollution, par exemple, peut, selon les cas, incomber à l’Etat, aux collectivités locales ou aux entreprises et établissements publics ou semi-publics. Les risques locatifs, sont ceux qui incombent au locataire et engagent par conséquent sa responsabilité. Il y a aussi des assurances tous risques et des provisions pour risques.

On parle aussi d’actuariat, d’actuaire, spécialiste de l’actuariat et de l’analyse actuarielle, c’est une méthode mathématique, ayant pour outils les statistiques et le calcul des probabilités appliqués aux opérations financières et fiscales, aux problèmes d’assurance, de prévoyance et d’amortissement. Font également partie de cette problématique, de ces phénomènes stochastiques, les statistiques qui sont une branche des mathématiques appliquées qui utilise le calcul des probabilités pour établir des hypothèses à partir d’événements réels comme en l’occurrence risques épidémiques, ou pandémiques, ou risques tout court, accidents, dégâts matériels ou autres sinistres, et faire des prévisions concernant des circonstances analogues. La stochastique est justement le calcul des probabilités appliqué au traitement des données statistiques.

Une catastrophe est un malheur effroyable et brusque, et qui ne vient jamais seule. C’est un accident ou sinistre susceptible de causer la mort de nombreuses personnes, ainsi une pandémie comme ces jours-ci, une catastrophe routière (carambolage), aérienne (crash), ferroviaire (déraillement) ou dite « naturelle » (sécheresse, inondation). On entend en mathématiques et en physique par théorie des catastrophes la théorie qui – à partir d’observations empiriques de la forme d’un système ou de processus discontinus comme les épidémies et pandémies, justement, les séismes, les éruptions volcaniques, les tsunamis ou les incendies de forêts – tente de construire un modèle dynamique continu comme les outils mathématiques de prévention ou d’alerte, les capteurs électroniques ou autres sentinelles numériques. Le sinistre est un événement catastrophique dit « naturel », comme l’incendie, les inondations, le naufrage ou le tremblement de terre, qui occasionne des dommages ou des pertes parfois considérables et dont le remboursement est souvent pris en charge par l’Etat et / ou par les assurances. Aussi l’indemnisation des régions et / ou des populations sinistrées représente-t-elle parfois, et même assez souvent, quand elle est prise en compte par les politiques, des postes budgétaires considérables. Et les bonnes prévisions, les bonnes politiques, en matière budgétaire, l’anticipation ou la prospective budgétaire, ne perdent jamais de vue le processus aléatoire dans l’établissement d’un budget et l’état d’avancement de son exécution. Les sinistrés, c’est-à-dire les personnes qui ont été victimes d’un sinistre, qui ont subi des dommages du fait d’un événement catastrophique, décèdent ou vivent souvent mal leur drame. Dans ce cas-là, l’Etat, notamment dans les pays atteignant un niveau de développement satisfaisant, met systématiquement à la disposition de ces sinistrés, ou leurs ayants droits, outre l’aide matérielle (hébergement, nourriture), des cellules d’urgence de traitement, ou d’aide psychologique afin de les aider à surmonter l’état de choc dont ils peuvent être les victimes.

B)- La nature de ces risques, catastrophes et autres sinistres
La nature de ces risques, catastrophes et autres sinistres signifie l’ensemble des caractères, des propriétés, qui les définissent et qui, par le fait même, les rangent dans une même catégorie considérée ainsi comme constituant un genre, une entité, susceptible d’être répertoriée, analysée et décortiquée afin de mieux la cerner et pouvoir, sinon la neutraliser, du moins compresser son envergure et, partant, comprimer ses effets néfastes, « museler » ses conséquences délétères. A l’analyse de tous ces risques et catastrophes on ne peut que constater la disparité et la diversité qui les caractérisent. En effet, ces risques, catastrophes, épidémies, et autres sinistres, sont si nombreux, si divers et complexes qu’ils n’ont souvent d’égal que l’importance de la responsabilité de l’Etat lui-même : national ou étranger. Aussi peut-on aller des plus frappants, des plus visibles, des plus spectaculaires comme les incendies, les tornades, les inondations, la sécheresse ou la famine jusqu’aux plus sournois, plus perfides, plus traîtres comme les épidémies, les pandémies, la pauvreté, la précarité, le chômage structurellement élevé, le dénuement et la misère. Bien que, comme dit la chanson, « la misère soit moins pénible au soleil ».

On peut certes relever différents types de risques, catastrophes ou sinistres, qui peuvent être d’origine dite « naturelle », comme la sécheresse et les effets délétères qui s’ensuivent : exode rural et bidonvilles (cas du Maroc ou d’autres pays similaires), ou famine, particulièrement dans les pays sub-sahariens comme au Nigéria, en Somalie ou au Soudan, les moussons et cyclones ou les fortes précipitations entraînant des inondations déferlantes ou des tornades dans les pays asiatiques comme au Bangladesh, au Pakistan ou en Inde, ou dans les pays européens comme récemment au Royaume-Uni, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Roumanie ou en France, ou encore en Amérique du Nord (Louisiane), en Jamaïque, aux Caraïbes, ou à Cuba. Il y a aussi des catastrophes d’origine humaine, voire criminelle, comme les accidents de la route – certains pays sont tristement placé pour le savoir – les incendies en Grèce, au Brésil, aux E.U.A. et en Australie, ou d’origine industrielle comme la pollution atmosphérique, des eaux et des nappes phréatiques, ou des mers et océans par les marées noires et autres hydrocarbures ce qui est le fait principalement des grands pays industrialisés comme les E.U.A., mais aussi des pays émergés ou émergents comme le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine ou le Mexique. Ou encore, le coronavirus ou Covid-19, qui frape aujourd’hui le monde entier, sauf de rares exceptions réelles ou officielles comme Taïwan, Hong Kong, le Laos, la Corée du Nord, la Slovaquie, Gaza en Palestine ou le Bangladesh.

Les experts en matière de risques majeurs sont unanimes pour dire qu’il n’y a pas de catastrophes naturelles. L’aléa naturel le plus massif qu’ait connu le XXème siècle fut la chute d’une météorite géante le 30 juin 1908 sur la Toungouska (affluents de l’Ienisseï) en pleine Sibérie, ravageant 2 000 km2 mais qui n’a provoqué aucune victime humaine. Les catastrophes dites naturelles ne sont peut-être pas aussi naturelles qu’elles semblent le paraître. Puisque le risque qui est en fait constitué par la relation entre l’aléa naturel et la vulnérabilité ne se transforme réellement en catastrophe que lorsque le contexte social le lui permet. Les sources humaines de la vulnérabilité aux phénomènes naturels sont de trois ordres : d’abord la combinaison de la démographie, de la pauvreté et de l’occupation des zones à risque, ensuite les transformations de l’environnement (macadamisation des sols, déforestation, déboisement, remembrement et intensification de l’agriculture) et enfin le manque, voire l’absence, de prévention ou de prise en charge des populations concernées et de responsabilité des pouvoirs publics en place

C)- Les organes cibles de ces risques, catastrophes et autres sinistres
On entend par « organe cible » toute espèce ou catégorie, tout corps ou individu victime de ces risques et catastrophes. Aussi peut-on les répertorier en trois grandes catégories : les personnes, les biens et l’environnement.

1)-Les personnes sont les individus, groupes ou groupements auxquels est reconnue, ou non reconnue (aliénée), la capacité d’être sujet de droit. On distinguera ainsi les personnes physiques, les individus comme vous et moi, en chair et en os, et les personnes morales, les groupements de personnes ou les établissements titulaires d’un patrimoine collectif et dotés de droits et d’obligations, mais n’ayant pas d’existence corporelle. Les personnes physiques sont les hommes, les femmes et les enfants. Les personnes morales sont de droit public, à l’exemple des Etats, des collectivités locales et des entreprises et établissements publics et semi-publics, et de droit privé, à l’exemple des entreprises privées, des syndicats et associations, des coopératives.

Les risques, catastrophes et autres accidents ou sinistres qui peuvent frapper de plein fouet les personnes sont les pénuries et famines, les épidémies, pandémies et autres contagions : choléra, peste, paludisme, variole, tuberculose, sida. Le Sida de son nom entier scientifique est HIV : Human Immunodeficiency Virus, les pays les plus touchés au Monde sont l’Afrique du Sud, le Nigeria et l’Inde. Il y a aussi les récessions, crises et dépressions économiques. Les effondrements des cours et catastrophes boursières de 1929, 1987, 1998, 2008, génératrices de chômage structurel, de faillites, de malaises et troubles sociaux, de la précarité, de la pauvreté et de la misère, ainsi que de la privation des droits civils, civiques ou politiques sont là pour nous rappeler leurs effets. La privation de la liberté d’entreprendre, de travailler, de circuler, de voyager, voire de se regrouper sont les conséquences immédiates de cette crise sanitaire du Covid-19 qui sévit encore aujourd’hui (2020). L’intoxication alimentaire – faute de contrôle d’hygiène et de sécurité sanitaire des aliments – est un sérieux problème de santé publique national et international. La contamination peut affecter tout le processus de la chaine alimentaire, depuis la manipulation, jusqu’à la commercialisation, en passant par la préparation et le stockage des aliments. Le commerce de ces produits intoxiqués comme les conserves ou les huiles de vidange usées des véhicules mélangées à l’huile d’olive, notamment dont les victimes sont devenues tétraplégiques à la suite de la consommation de ces huiles vendues sur les marchés marocains dans les années 1960, sont encore présentes dans la mémoire collective.

2)-Les biens sont les choses matérielles qui procurent une jouissance et susceptibles d’appropriation, et tout droit faisant partie du patrimoine, c’est-à-dire « l’ensemble des droits et des charges d’une personne appréciables en argent » comme les définit Marcel Planiol dans son Traité élémentaire de droit civil (1899-1901). On distinguera ainsi les biens meubles et immeubles, les biens publics et privés. Les biens meubles sont les biens qui peuvent être déplacés ou réputés tels par la loi. On différenciera les biens par nature ou les biens corporels comme les animaux, le mobilier, les navires, les matériaux de construction, les marchandises, des biens par la détermination de la loi ou des biens incorporels comme les créances, les rentes, les actions et obligations, les fonds de commerce, les droits d’auteur, les offices publics ou ministériels, c’est-à-dire les fonctions publiques conférées à vie par une décision de l’autorité comme l’office d’avoué à la cour d’appel, d’huissier, de notaire ou d’agent de change…

Les biens immeubles sont les biens qui ne peuvent être déplacés ou réputés tels par la loi. On différenciera les biens immeubles ou biens immobiliers par nature comme le sol, les bâtiments, et les biens immeubles par destination comme les biens mobiliers attachés par le propriétaire à un immeuble par nature ainsi les accessoires de biens ou les droits réputés immeubles comme les portes, fenêtres, volets et stores, la cheminée, la chaudière, les radiateurs, le ballon d’eau chaude, les placards et penderies…Les biens publics sont les biens qui composent le domaine public de l’Etat ou des collectivités locales, et sont affectés à l’usage direct du public ou à un service public comme les cours d’eau, les rivages, les routes, les voies ferrées, les gares, les casernes, les marchés…Les biens privés sont les biens appartenant aux particuliers et qui constituent leur propriété privée, leur conférant ainsi le droit d’user, de jouir et de disposer d’une chose (droits réels et personnels) d’une manière exclusive et absolue sous les restrictions de la loi. Et lorsqu’ils forment le domaine privé de l’Etat ou des collectivités locales, ils sont de même nature que ceux des particuliers (biens meubles et immeubles).

Les risques, catastrophes et autres sinistres qui peuvent s’abattre sur les biens, biens de tout genre, et sur les personnes aussi, sont particulièrement les incendies qui ravagent les forêts, anéantissent les récoltes et détruisent les propriétés et les entreprises. Les inondations qui engouffrent les habitats, les cultures, les stocks et les récoltes sur pieds. Les séismes qui engloutissent des quartiers, des agglomérations voire des villes entières (comme l’effondrement de la ville d’Agadir en février 1960 ou l’éboulement d’un bidonville en septembre 2008 en Egypte). Les épidémies qui frappent les animaux ou l’épizootie comme la rage des chiens, l’encéphalite spongiforme, appelée couramment maladie de la vache folle ou la fièvre aphteuse (atteignant surtout les bovidés), la grippe aviaire (virus des oiseaux), « lbayoude » des palmiers dattiers, le phylloxéra qui détruit les vignes, le mildiou de la pomme de terre (le phytophtora) ou de la betterave (la péronosporacée). Les maladies qui frappent les huîtres, les moules, les palourdes et autres mollusques comestibles (virus, algues microscopiques). Et surtout, les virus qui, par leur propagation, font des ravages dans les humains comme la peste noire, la grippe dite espagnole, le paludisme, le choléra, le Sida ou encore aujourd’hui la Covid-19.

3)-L’environnement est l’ensemble des conditions naturelles (physiques, chimiques, biologiques) et culturelles (sociologiques) dans lesquelles les organismes vivants (en particulier les hommes) se développent. « Nous n’héritons pas de la Terre de nos ancêtres, nous l’empruntons à nos enfants ». Cette phrase célèbre de Saint-Exupéry (1900-1944), renvoie à la protection de la nature, à la préservation de l’environnement et au développement durable. Dans la mesure où les ressources sont limitées, la planète est fragile et les inégalités entre pays s’accroissent, devenant alors des facteurs de violence. Aussi l’environnement, le social et l’économie sont-ils intimement liés et la dégradation du bien commun, par la pollution de l’air, de l’eau et du sol et par d’autres nuisances techniques ou sociales comme les bruits, les encombrements, la promiscuité ou l’insalubrité, l’aggravation des inégalités et handicaps sociaux, l’expansion de la pauvreté et de la précarité, soulignent-ils l’importance des enjeux écologiques et leurs implications multidimensionnelles : sociales, économiques et politiques.

Les risques, catastrophes et autres sinistres qui peuvent dégrader l’environnement, dans ses trois composantes (l’air, l’eau et le sol) sont essentiellement d’origine industrielle. Les risques et altérations atmosphériques sont principalement les risques de pollution dus à différents agents pathogènes. On relèvera ainsi la dioxine, aux émissions de dioxyde de carbone (CO2), de poussières, de gaz à effet de serre, et aux C.F.C.. Ces agressions successives détériorent ou menacent de détériorer l’atmosphère, c’est-à-dire la couche d’air qui entoure le globe terrestre, la couche la plus proche du sol qui est le siège des hydrométéores, éléments indispensables à la vie et à la biodiversité, comme les nuages, le brouillard, la pluie, la grêle, la rosée, le givre ou le verglas.

Les risques et dégradations aquatiques sont ceux ou celles qui contaminent ou menacent de contaminer les eaux, donc la vie, quelles que soient ces eaux : fluviales, lacustres, marines ou nappes phréatiques, par des agents pollueurs, physiques, chimiques ou biologiques comme le mercure, les nitrates, lixiviats, solvants et détergents…Les risques et détériorations terrestres sont ceux ou celles qui dégradent ou menacent de dégrader le sol, la faune, la flore, et à terme l’homme aussi. Que cela se produise par externalisation des produits polluants (déchets radioactifs, déchets industriels, pesticides, insecticides, engrais chimiques et autres fertilisants, décharges sauvages) ou par internalisation de certaines activités (déforestation en Indonésie et au Brésil) défrichement des forêts et des landes, grands remembrements, intensifications et uniformisations de la culture, Beauce en France ou plaines de Bangeb en Inde. De telles activités ont provoqué de graves problèmes d’usure des sols, de fatigue de la terre, d’érosion de l’écorce terrestre, des déséquilibres de l’écosystème et de raréfaction de la biodiversité.

Le concept d’environnement est en effet un concept global qui prend en compte trois notions fondamentales, étroitement liées les unes aux autres : l’environnement, le social et l’économie. Aussi pour qu’une action soit efficace, force est d’agir dans les trois domaines en même temps : par la préservation de l’environnement et l’amélioration de la qualité de vie, par le respect des droits et des libertés de la personne, et par la satisfaction des besoins essentiels des communautés humaines présentes et futures. Force, par ailleurs, est de préciser que la préservation de l’environnement n’est en définitive que la consécration de ces mêmes droits et libertés comme le droit à la vie, le droit à la santé, le droit à la dignité humaine, le droit à un logement décent, à un niveau de vie décent, à une qualité de vie décente, le droit de respirer un air saint…

II)- Les causes de ces accidents, calamités et autres dégâts
Au-delà des causes apparentes, des causes ostentatoires qui immédiatement sautent aux yeux, il existe de véritables causes, des causes réelles susceptibles de déterminer, avec exactitude, la véritable responsabilité sociale des Etats.

A)- Les causes apparentes de ces accidents, calamités et autres dégâts
A priori, les causes de l’ensemble de ces événements fâcheux et malheureux, imprévus et soudains parfois, ces événements qui sont de grands malheurs publics, collectifs et communautaires tels que guerres, autoritarisme et dictature, épidémies, retombées radioactives, séismes, tsunamis, sécheresses, famines, inondations, marées noires, pauvreté, misère, dépression et chômage structurel occasionnant victimes, dégâts, dommages, violence et autres détresses, diffèrent selon la gravité, la diversité et la complexité de leurs effets. Ainsi, les causes de la guerre peuvent-elles être d’origine politique (agression, annexion, hégémonie, défense nationale), économique (conquête, appropriation, usurpation) ou culturelle (conflits ethniques ou sociaux). Certaines puissances appliquent l’adage latin à la lettre : « Si vis pacem, para bellum », « si tu veux la paix, prépare la guerre », d’autres vivent en guerre, sur le pied de guerre avec tout le monde, puisque comme dit le proverbe : « qui terre a, guerre a », c’est-à-dire la possession de terres, de richesses est source de conflits.

Les causes d’autoritarisme et de dictature peuvent être tout simplement l’envie et le désir d’un régime politique, d’un gouvernement de vouloir confisquer le pouvoir et le conserver. Les causes d’une épidémie, d’une épizootie (épidémie infectant les animaux) ou d’une épiphytie (épidémie infectant les plantes) peuvent être l’apparition accidentelle d’une maladie infectieuse transmissible et l’accroissement considérable du nombre des cas dans une région, une collectivité ou au sein d’une population. Les causes des retombées radioactives (Hiroshima, Nagasaki) ou biochimiques (Irak) peuvent être les instruments ou les conséquences de la guerre, des erreurs humaines comme ce qui s’est passé à Tchernobyl en 1986 en ex. URSS où la radioactivité a contaminé toute la cité (population, faune et flore), ou ce que l’on peut considérer comme des actes criminels aux Antilles (Guadeloupe et Martinique) où la pollution chimique par le chlordécone, insecticide toxique très puissant, pour lutter contre le charançon dans les bananeraies, pose de graves problèmes de santé et d’environnement.

Les causes des séismes ou tsunamis peuvent être dues à des explosions ou éruptions volcaniques ou être d’origine tectonique (tectonique des plaques). Les causes de la sécheresse, des acridiens, de la famine, de la pauvreté et de la misère peuvent être dues au temps sec, à l’insuffisance ou au manque de précipitations, à l’aridité du sol, puis à la pénurie d’aliments et à la crise alimentaire. Les causes des inondations peuvent être l’abondance des pluies, la fonte des neiges, la crue d’un torrent ou les hautes eaux d’une rivière. Les causes des incendies peuvent être tout simplement involontaires en raison des brins ou débris végétaux secs qui ont pris feu sous l’effet de réverbération du soleil sur un morceau de verre nu, ou des actes non maîtrisés comme une étincelle crachée par une débrousailleuse, ou des actes franchement criminels comme les comportements de pyromanes. Les causes de la marée noire, sur la côte Sud-africaine au Cap de Bonne Espérance par exemple, ou en Espagne, en France, au Portugal à Chypre, ou ailleurs, peuvent être dues à la vaste nappe d’hydrocarbures répandue à la surface de la mer à la suite du naufrage d’un pétrolier, de dégazage des tankers ou de la rupture d’une tête de puits sous-marin, qui pollue l’eau et les côtes. Les causes de la dépression et du chômage structurel, de la récession, des krachs financiers et d’autres crises économiques peuvent être dues au fléchissement de la consommation, à la spéculation et la chute des cours, à la baisse de la production et des prix, à la destruction de l’emploi et la montée du chômage, à une fiscalisation aveugle et au manque de compétitivité.

Les causes des épidémies sont multiples. Aussi l’apparition et la propagation d’un grand nombre de cas d’une maladie infectieuse transmissible comme la grippe, la méningite, la poliomyélite, la rougeole, la fièvre jaune, la diphtérie, la tuberculose, le choléra, le paludisme, l’Ebola, ou le coronavirus (Covid-19) – celui qui sévit, en ce moment, dans le monde entier, sont-elles les conséquences de nombreux vecteurs. Elles peuvent être le prolongement de phénomènes climatiques (sécheresse, saison des pluies ou inondations), d’explosions démographiques (pauvreté et rareté, manque d’hygiène et d’assainissement favorisant le choléra), de conflits frénétiques désorganisant les systèmes de santé ou de guerres « chaudes » ou froides n’excluant aucune arme, atomique, nucléaire, chimique, bactériologique ou virale. Dans de pareilles situations, c’est l’homme, contaminé par un virus d’origine animale, qui reste le principal vecteur de la maladie. Aussi les meilleurs moyens d’enrayer l’épidémie sont-ils indéniablement les réactions immédiates des pouvoirs publics, des professionnels de la santé, mais aussi de la population, par le confinement, l’hygiène et la sécurité sanitaire ainsi que la mise en place de structures de soins provisoires pour renforcer celles qui existent déjà ou remplacer celles qui font défaut afin accueillir les malades, les diagnostiquer, les soigner et, le cas échéant, procéder à une vaccination de masse.

B)- Les causes réelles de ces accidents, calamités et autres dégâts
Toutefois, à l’analyse de toutes ces causes que l’on peut qualifier d’apparentes, de visibles ou d’ostentatoires, on s’aperçoit que la vraie cause, la cause profonde de tous ces malheurs, de toutes ces détresses, vient en grande partie de l’Etat, national ou étranger, de l’attitude de l’Etat, du comportement de l’Etat, de la conduite de l’Etat. L’Etat au sens de manière d’être d’un groupement humain ou de mode d’organisation politique, de forme de gouvernement (local, régional, national, communautaire ou international), de régime politique et socioéconomique : démocratique, oligarchique, autocratique ou théocratique, libéral, dirigiste, fasciste ou makhzénien.

Ainsi si l’on reprend, une à une, toutes ces catastrophes, calamités et détresses qui s’abattent, parfois aveuglement, sur l’homme, la faune et la flore, on ne peut que constater le facteur commun, la cause commune et profonde qui les rattachent toutes : à savoir la conduite des Etats et des gouvernements. Puisque les guerres, par exemple, peuvent avoir comme cause profonde l’imprudence, la présomption, l’hégémonie ou l’arrogance de l’Etat et de la catégorie dirigeante. L’autoritarisme ou la dictature d’un Etat, d’un gouvernement ou d’un régime politique peut avoir comme cause ultime la volonté de conserver le pouvoir coûte que coûte. Des rapports publiés chaque année par des ONG internationales et des recours déposés par des associations pour recel et détournements de fonds publics assurent que les avoirs détournés et les biens mal acquis par les dictateurs des pays du Sud au cours de ces dernières décennies représentent entre 100 et 180 milliards de dollars, soit entre 1000 et 1800 milliards de dh (Al Bayane du 30 avril 2007).

Les épidémies, quelles qu’elles soient, celles qui frappent les hommes, les animaux ou les plantes, peuvent avoir comme cause principale la défaillance des pouvoirs publics (Etat, gouvernement, C.T.) en matière de ressources humaines (médecins, épidémiologistes, virologue, infectiologues), de logistiques (organisation, services, matériel) et de prophylaxie (prévention, vaccination). La lutte par tous ces moyens est indispensable pour neutraliser tous rapports existant entre le virus ou le phénomène biologique responsable et les divers facteurs comme le mode de vie, le milieu ambiant ou social, les particularités individuelles susceptibles d’exercer une influence sur l’apparition du virus, sa fréquence, sa distribution, son évolution et sa propagation. Les retombées radiologiques ou biochimiques d’une guerre sur la population, le territoire ou l’écosystème de manière générale d’un pays, d’une région ou d’une collectivité peuvent avoir comme causes la guerre elle-même certes, mais aussi et surtout les responsabilités et les erreurs des chefs de gouvernements ou des Etats belligérants ayant entraîné, en aveugle, leurs pays dans des mésaventures dommageables.

Les séismes, tsunamis et autres explosions souterraines ou volcaniques ayant fait ou faisant de nombreuses victimes et de lourds dégâts matériels peuvent avoir comme principale cause la responsabilité première de l’Etat qui n’a pas empêché la construction des habitats, entreprises et établissements et l’installation des populations dans des zones à risque, ou le cas échéant, qui n’a pas installé les équipements antisismiques, les outils électroniques et pris toutes les mesures nécessaires afin de pouvoir éviter les conséquences dommageables de ces événements inéluctables. Les inondations peuvent avoir comme cause ultime le fait tout simplement des pouvoirs publics qui n’ont pas interdit la construction près des fleuves qui sortent de leur lit pendant les périodes de très hautes eaux, de laisser construire dans le lit même d’un fleuve dont l’étiage s’est longtemps prolongé ou de laisser construire dans des zones ou sur des terres inondables ou qui risquent d’être inondées pendant les grandes crues.

Les incendies peuvent avoir comme cause majeure la défaillance des pouvoirs publics en matière de prévention (moyens humains, matériels et électroniques), de gestion (rationalité) et de résorption (sapeurs pompiers, bombardiers, canadairs, extincteurs). Les marées noires peuvent avoir comme cause majeure les actes irresponsables de certaines compagnies pétrolières mais aussi et surtout la défaillance de l’Etat ou de la communauté internationale (ONU, etc.) en matière de contrôle rigoureux de la qualité matérielle des pétroliers naviguant dans les eaux territoriales ou internationales, d’interdiction stricte de dégazage en mer et de surveillance, entretien et contrôle sévère des puits pétroliers sous-marins.

Les sécheresses, les invasions acridiennes et les famines, la pauvreté, la précarité et la misère peuvent avoir comme cause profonde la défaillance des pouvoirs publics (E. Gt. C.T.) qui n’ont pas su travailler durement afin de pouvoir installer un système d’irrigation global performant, quitte à recourir au dessalement de l’eau de mer, pour ne pas dépendre entièrement de la pluie et des aléas climatiques. Ils devraient pouvoir établir un réseau d’infrastructures très solide nationalement et internationalement, afin de créer la richesse, l’emploi et la propreté, de stimuler la production, la distribution et la consommation, chasser l’oisiveté et le crime, la corruption, l’économie souterraine et illégale, encourager le travail et l’entreprise et responsabiliser l’administration et le citoyen. Les dépressions, récessions, krachs financiers, chômage structurel (chez les Inuits au Canada, chez les Aborigènes en Australie, mais aussi en Afrique subsaharienne, dans les cités des banlieues en Europe, en Afghanistan, ou en milieu rural au Maroc) et autres facteurs de crises et de sous-développement peuvent avoir comme causes majeures des orientations de politiques publiques désarticulées, étriquées, sans vision, ni profondeur, voire arrogantes.

C)- La part de responsabilité sociale des Etats dans les accidents, calamités et autres dégâts (ou la loi des risques, catastrophes et sinistres)
Il est intéressant de noter que des recherches scientifiques très poussées (Etudes des experts sur le climat, documentaire de Yann-Artus Bertrand, 24 août 2008) sur la pollution de la planète par les émissions de gaz carbonique des automobiles (gaz à effet de serre, GES), l’utilisation des pesticides (insecticides, herbicides, fongicides), fertilisants et autres engrais chimiques ainsi que la culture des OGM (Organismes Génétiquement Modifiés), ont démontré que les politiques sont, de par leur défaillance, largement responsables dans la dégradation de la qualité de vie sur notre planète. La responsabilité de l’homme dans le réchauffement climatique est estimée par les scientifiques à plus de 90 % (Le Monde du 3 fév. 2007).

Les besoins de nouvelles connaissances, de manière générale, sont énormes en santé comme en environnement, en économie comme en société (Le Monde du 30 mars 2007). Un rapport d’analyse de l’Agence française de sécurité sanitaire environnementale et du travail de 2007 évalue l’impact de la pollution sur les dépenses de santé en France à plusieurs centaines de millions d’euros par an, soit plusieurs milliards de dh par an. Il a été estimé, à partir des données disponibles pour deux pathologies (le cancer et l’asthme) que le coût de la prise en charge des soins de ces deux pathologies attribuables à l’environnement est de l’ordre de 0,1 à 0,5 milliard d’euros pour le cancer et de 0,2 à 0,8 milliards d’euros pour l’asthme. En ce qui concerne l’asthme, c’est le coût de la pollution atmosphérique extérieure non biologique qui a été pris en compte (Le Monde du 16 nov. 2007). Toutefois cette analyse qui a été effectuée en dehors des patients, de leur maladie, de leur entourage et de la qualité de leur vie, ne prenait effectivement en compte qu’une partie de la valeur économique de l’impact sanitaire des dégradations de l’environnement, qui peut être estimée à une dizaine milliards de dh.

Au Maroc, la pollution atmosphérique de la région de Sidi Moumen – Bernoussi à Casablanca, par les fours d’incinérations de déchets industriels et toxiques et par la combustion de câbles électriques, de pneus et de batteries par les professionnels de la ferraille, empoisonne la vie et l’environnement des habitants de la région (Le Matin du 26 oct. 2007). Le coût de la réalisation du programme national d’assainissement des eaux usées et de dépollution des rivières (Oued Sebou, Oued Fès, etc.) s’élève à 43 milliards de dh (Libération du 4 mars 2007). La production d’ordures ménagères en France atteint aujourd’hui 360 kg par an et par habitant en moyenne, dont seuls 20% font l’objet d’un recyclage ou d’une valorisation (Magazine d’information de la commune de Carnac, Morbihan, août 2008). Le coût de la gestion de ces déchets (coût de la collecte et du traitement) est estimé à 11 milliards d’euros (Le Monde du 2 nov. 2007), soit plus de 110 milliards de dh. Le coût de gestion de la tonne est de 150 euros, soit 1500 dh. Victime de l’incurie politique et en proie à un trafic organisé des déchets, la région de Naples en Italie est au bord d’une catastrophe écologique et sanitaire. Elle produit 7300 tonnes par jour, soit 2,7 millions de tonnes chaque année, sur les 31 millions de tonnes que produit l’Italie, soit 9 % du total (Libération, quotidien français, du 14 mai 2007).

Le PIB du Brésil, pays émergé, se répartit comme suit : les services produisent 64% des richesses, l’industrie 28%, l’agriculture 3%. Les chiffres affinés de ce pays intègrent l’économie « informelle » qui emploie au noir 40% de la population active (Le Monde du 30 mars 2007). Toutefois même dans les vieux pays industrialisés comme la France, quand la société n’offre que précarité et revenus modestes aux cités des banlieues, l’économie souterraine de ces cités est florissante (Le Monde du 2 nov. 2007). Au Maroc, l’économie informelle, notion complexe, qui va des cireurs, colporteurs, vendeurs à la sauvette et marchands des quatre saisons, jusqu’à la production non marchande des biens pour usage final propre, en passant par des activités souterraines ou dissimulées afin d’échapper aux obligations d’imposition, de charges sociales, de salaire minimum ou de sécurité et d’hygiène, ou des activités illégales comme la drogue, la prostitution, la contrebande, la contrefaçon, la corruption, le recel des biens volés ou l’exercice illégal de la médecine, emploie probablement plus de la moitié de la population active (cf. Etude pilote sur la Joutiya de Derb Ghallaf, ibid.).

Les aléas climatiques au Maroc ont un poids considérable sur l’économie, la société et la formation brute du capital fixe, que ce soit positivement de par les précipitations, quand elles existent, en tout cas pas ces dernières années, 2019-2020, ou négativement à travers les déficits pluviométriques récurrents. Les ignorer, c’est ignorer toutes les conséquences fâcheuses de la sécheresse sur le prix des denrées, sur le pouvoir d’achat, la fixation de la population, la structure de la campagne, la configuration de la ville, la santé du cheptel et l’approvisionnement en semences. Ainsi, un pays ou un Etat qui, économiquement, compte sur la pluie on ne peut compter sur lui. La transition démocratique n’a sans doute pas de sens si, sur le plan économique et social, le programme de l’Etat n’implique pas une lutte franche et résolue contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion (L’Opinion du 13 mai 2007).

L’expérience a démontré qu’une collectivité territoriale (locale, régionale, nationale) qui a la capacité d’exploiter ses potentialités économiques (agriculture, pêche, industrie, énergie, services, recherche) dans des conditions optimales (qualité d’administration et de gestion, de contrôle et de suivi, d’audit et d’évaluation) serait en mesure, toute chose étant égale par ailleurs (petite, moyenne ou grande), de multiplier son revenu (production, output, PIB, PNB, PLB) par un multiplicateur dont la fourchette peut aller de 5 à 10. La variation du multiplicateur à l’intérieur de cette fourchette est fonction de la valeur économique de la ressource concernée (pétrole, pêche, phosphate, café, cacao, industrie, informatique, transport, énergie), du coût et de la qualité de son exploitation. Ainsi l’équation peut-elle être écrite sous la forme de : Rq = Rt (v + c). D’où R = revenu ordinaire ; q = qualité d’administration, de gestion et d’audit ; Rt = revenu transformé ; v = valeur économique de la ressource, c = coût de l’exploitation de la ressource. Donc, Rq = Rt (v + c).

Les exemples abondent où de petits groupes à vocation sociale, extérieurs aux cadres institutionnels, souhaitent pallier les insuffisances de l’Etat dans des secteurs aussi variés que des ONG et autres tissus associatifs (Emmaüs, Médecins du monde, la microfinance ou la Grameen Bank fondée par Mohamed Yunus au Bangladesh qui a voulu remédier à l’exclusion des pauvres du système bancaire, la néerlandaise SOS Wereldhandel et la britannique Oxfam pour le commerce équitable dans les échanges internationaux (café, riz, cacao, tomate, huile d’argan), les préoccupations écologiques par N. Hulot, Y. Artus Bertrand ou Wangari Maathai, les droits de l’Homme par Amnesty ou Human Rights, les Enfants de Don Quichotte pour les sans-abri). Toutes ces composantes de la société civile se sont trouvées en situation de combler les lacunes et défaillances de l’Etat dans des domaines aussi multiples et variés que l’exclusion, la détérioration des termes de l’échange, l’enfance, le droit au logement opposable ou l’environnement (Le Monde du 6 fév. 2007).

Ainsi, peut-on donc mesurer cette corrélation entre les risques, catastrophes et autres sinistres que peuvent subir les personnes, les biens ou l’environnement et la responsabilité sociale de l’Etat à partir du graphique ci-dessous. Où la grandeur « Coût du risque ou de la catastrophe » est portée en ordonnée, coordonnée verticale, variable y, et la grandeur « Niveau de défaillance de l’Etat » ou degré de responsabilité de l’Etat est portée en abscisse, coordonnée horizontale, variable x. Donc y = f(x), f est la fonction, x est la variable (ou variable indépendante) et y l’image de x (ou variable dépendante). Donc la fonction est la relation qui existe entre deux quantités, telle que toute variation de la première (x) entraîne une variation correspondante de la seconde (y). Autrement dit, le risque ou la catastrophe (y), donc la gravité des dégâts est fonction de l’importance de l’intervention de l’Etat (x). L’importance de l’intervention de l’Etat, donc l’importance du coût de cette intervention, détermine la gravité des dégâts et par conséquent la position de cette gravité dans le plan.
Figure 1

En conséquence, plus l’intervention de l’Etat est importante, en matière de risques, catastrophes et sinistres, plus la gravité des dégâts humains, matériels et écologiques est faible. Et inversement, plus l’intervention de l’Etat est faible, en matière de risques, catastrophes et sinistres, plus la gravité des dégâts humains, matériels et écologiques est forte. La courbe de gravité des dégâts A est surtout déterminée par le point d’arrivée ou l’extrémité haute de la courbe qui est au-dessus du niveau 4 de l’axe des ordonnées, variable y. La courbe de l’intervention de l’Etat B est surtout déterminée par le point d’arrivée ou l’extrémité haute de la courbe qui est situé au niveau 4 de l’axe des abscisses, variable x.

III)- Les moyens de prévention et de résorption de ces désastres, drames et fléaux
L’Etat se doit de rassembler toutes les forces et potentialités à sa disposition afin de pouvoir sinon neutraliser du moins ramener à un niveau très faible tous les risques, catastrophes et autres sinistres qui pourraient menacer les membres de la collectivité en leurs personnes, leurs biens ou leur environnement. Prenons quelques exemples frappants : pourquoi l’Ethiopie dépend-elle, en l’état actuel des choses, entièrement de l’aide alimentaire mondiale ? Alors que le Nil prend sa source, paradoxalement, dans son territoire ? Remarquez qu’elle est en train de se réveiller en construisant sur le Nil précisément, le plus grand barrage de toute l’Afrique. Mieux vaut tard que jamais ! Pourquoi l’Egypte qui est l’un des pays les plus secs au monde a-t-elle su pomper et acheminer l’eau du Nil jusqu’au désert et ainsi capter et exploiter 75 % de ses eaux ? Bien qu’il lui reste beaucoup à faire dans les domaines socioéconomiques et politiques ! Pourquoi le Maroc dépend-il, encore aujourd’hui, 2020, des précipitations, de la pluviométrie et des aléas climatiques ? Alors qu’il a acquis son indépendance depuis 1956 et qu’il est doté d’une terre gorgée d’eau de par ses chaînes montagneuses de l’Atlas et du Rif et des eaux territoriales à perte de vue, sur des milliers de kilomètres ? Pourquoi l’Islande, petit pays insulaire de quelque trois cent quarante quatre mille habitants, a-t-elle su faire de son pays, un pays décemment développé et ce, grâce à la pêche, aux ressources hydroélectriques et grâce surtout à la volonté des politiques ? Pourquoi Dubaï, petit Emirat de la fédération des Emirats Arabes Unis, trois millions cent mille habitants, qui n’était encore il y a 50 ans qu’un petit village de pêcheurs traditionnels, s’est-il propulsé aujourd’hui sur la scène internationale, doté d’un niveau de vie digne des pays les plus industrialisés du monde et sera-t-il peut-être demain le pays touristique le plus important de la planète ? Aussi, trois grands axes, en matière de prévention, de gestion et de résorption de ces risques et catastrophes se dégagent-ils clairement : les moyens financiers tout d’abord, les moyens humains ensuite et les moyens techniques enfin.

A)-Les moyens financiers engagés dans la prévention, la gestion et la résorption des risques, catastrophes et autres sinistres
Les moyens financiers consisteraient principalement à assainir les finances publiques en adoptant un mode de gestion responsable, éthique et rationnel. L’assainissement des finances publiques peut ainsi se faire sur la base de trois paramètres : le premier est l’exploitation optimale des ressources économiques du pays, et il y en a suffisamment, et de toutes les catégories. Le deuxième est la qualité de gestion de l’économie, des finances et du patrimoine, ce qui exige le déverrouillage du système et l’intégration des compétences nécessaires aux postes de décisions administratives et aux hauts postes de consultations politiques. Le troisième enfin concerne le budget : diminuer le taux d’impôt, réduire son barème ou supprimer un autre impôt dans certains cas, quand c’est nécessaire ; augmenter le barème d’un impôt ou ajouter certaines tranches à un autre dans d’autres cas, quand c’est indispensable ; dépenser rationnellement les ressources, pour la sécurité sociale, le logement, le travail, la santé, l’environnement ; investir rationnellement ces ressources en matière d’infrastructure, de production, de consommation, de croissance, de recherche et de développement ; réguler par une politique publique saine et rigoureuse en matière d’épargne, d’investissement, de production, de distribution, et de consommation ; l’ensemble doit être conduit dans une optique de gestion ferme et rationnelle. Ainsi doit-il y avoir un chapitre budgétaire dans le budget de l’Etat et dans ceux des collectivités territoriales d’un volume correct, responsable, vu l’importance et la gravité des sinistres et dégâts de tous genres occasionnés au Maroc chaque année. Ce chapitre budgétaire peut avoir comme intitulé : « Budget de la Protection Civile et du Développement Durable » (BPCDD), et peut être sous la forme d’un état prévisionnel et limitatif des recettes et des dépenses, de l’ensemble des activités de l’Etat, ou des collectivités territoriales en matière de prévention, de gestion et de résorption des risques, catastrophes et autres sinistres susceptibles de survenir pour l’année à venir.

Ce budget doit d’abord comprendre en matière de dépenses, une enveloppe d’envergure nationale de deux volets. Le premier volet sera consacré à la prévention de tous risques et catastrophes comme l’épidémie d’aujourd’hui, ou Covid-19, les incendies, les inondations, la sécheresse, les acridiens, le chômage structurel, les logements insalubres, de tous genres, la santé et l’hygiène publiques, la pauvreté, la précarité et l’exclusion. Le second volet est prévu pour la gestion de toutes les catastrophes et calamités qui se sont produites, en dépit de toutes les mesures de prévention, et qui nécessitent des interventions immédiates musclées et appropriées à l’exemple de la maîtrise et de l’extinction d’un incendie de forêt ou dans une entreprise, l’éradication totale des logements insalubres, la stimulation de l’emploi, de l’entreprise, du pouvoir d’achat, du niveau de vie, de la croissance et du développement durable. En matière de ressources les potentialités économiques (phosphates, énergie, pêche, agriculture, tourisme…) et la qualité de gestion de toutes ces richesses, ainsi que les prélèvements fiscaux, comme la retenue d’un pourcentage finement calculé sur le montant des grands impôts nationaux (TVA, IS, IR), l’imposition des externalités négatives ou la fiscalité écologique (pollution, déforestation, autres dégradations de la vie et de la nature) et la fiscalisation et / ou la tarification des internalités positives comme la qualité de vie et de l’air, la production des espaces verts et des infrastructures, formeront l’essentiel des recettes de ce budget.

B)-Les moyens humains engagés dans la prévention, la gestion et la résorption des risques, catastrophes et autres sinistres
Il doit y avoir également un ministre et un ministère pour s’occuper à temps plein du « Budget de la protection civile et du développement durable ». Car les qualifications et les compétences humaines sont en fait les plus importants de tous les moyens. On a souvent entendu de la bouche des européens, d’ailleurs à juste titre, à l’égard des pays pétroliers : « Vous avez le pétrole, nous avons les idées ». Avec la volonté, la recherche et l’action, l’homme, l’Etat et les politiques peuvent réaliser tout ce à quoi ils aspirent. L’Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics, les décideurs, ont un rôle majeur à jouer dans la mobilisation de l’ensemble des acteurs de la société (entreprises, associations, ménages, établissements scolaires et universitaires) pour la préservation de notre environnement. Engager de lourds investissements en matière d’assainissement, de certification de la préservation ou la qualité sanitaire des eaux potables, d’irrigation et de baignade. Le développement de l’éducation et de la formation est indispensable à la mise en œuvre des réponses adaptées aux urgences écologiques, pour donner à chacun les connaissances qui lui permettront de comprendre le fonctionnement complexe de son environnement, et donner à tous l’opportunité de se cultiver, de se divertir et l’envie d’exercer leur écocitoyenneté. L’aménagement durable des territoires doit être au cœur des préoccupations de tous les acteurs politiques tant nationaux que locaux, afin de pouvoir garantir le juste équilibre entre l’accroissement de l’activité économique et la préservation du patrimoine national. Les défis à relever sont nombreux, qu’il s’agisse de garantir la cohésion sociale à travers les politiques de logement, le travail et le transport collectif pour rompre l’isolement, de renforcer l’attractivité des territoires ou d’assurer l’intégration de l’environnement et des espaces verts dans les plans et documents d’urbanisme afin de réduire cette consommation croissante du foncier par l’urbanisme et ses conséquences immédiates sur l’agriculture. On observera que : de 1 à 2% de la surface agricole utile sort du milieu agricole chaque année, et les zones naturelles se voient amputer chaque année d’une partie de leurs richesses (champs, paysages, biodiversité…). Il est important aussi de développer le tourisme (blanc, bleu et vert) puisqu’il est un des piliers de l’économie marocaine. Il faut une mise en valeur de l’espace et une gestion intelligente de l’urbanisme et des monuments historiques, des espaces aquatiques et du patrimoine forestier. Trop de constructions désordonnées, trop de macadam défoncé, peu d’espace vert, et d’espace tout court, n’ont jamais été de la bonne politique d’urbanisme et d’aménagement de l’espace.

C)-Les moyens techniques engagés dans la prévention, la gestion et la résorption des risques, catastrophes et autres sinistres
Les moyens techniques sont, en l’occurrence, l’ensemble de procédés ordonnés, des facteurs de progrès techniques, technologiques et informatiques. Ils sont fondés sur des connaissances scientifiques, scientifiquement mis au point et employés à la prévention, à la gestion et à la résorption des risques, catastrophes et autres sinistres. Ces moyens techniques qui, à partir d’observations empiriques de processus discontinus, comme les épidémies, sinistres et catastrophes, appelée justement théorie des catastrophes, tentent de construire un modèle dynamique continu, doivent être capables de désamorcer, de neutraliser tous risques, catastrophes ou autres sinistres. En effet, deux branches de mathématiques sont indispensables, en l’occurrence, dans le domaine de la protection civile, des risques et des catastrophes : les mathématiques pures ou abstraites et les mathématiques appliquées. Les mathématiques pures ou abstraites étudient la quantité sous ses aspects continus et discontinus, comme les épidémies et catastrophes, ainsi que la notion d’ordre comme la topologie (étude dans l’espace réel) ou la théorie des groupes. Les aspects continus traitent du calcul différentiel, intégral ou infinitésimal : c’est l’analyse mathématique. Les aspects discontinus, ceux qui nous intéressent au premier lieu, traitent de l’algèbre élémentaire (al-jabr, Khawarizmi, les probabilités par ex.) et de l’arithmétique (théorie des ensembles, théorie des groupes, géométrie algébrique). Les mathématiques appliquées étudient la trigonométrie (étude des triangles), la géométrie descriptive (les dégâts, les victimes, par ex.), le calcul des probabilités (leur fréquence), et la physique mathématique.

Une droite continue représente l’ensemble R. Une droite discontinue représente l’ensemble N et l’ensemble Z. Une droite discontinue représente la discontinuité des risques, catastrophes et autres sinistres. Le calcul des probabilités est la grandeur par laquelle on mesure le caractère aléatoire (possible et non certain) d’un événement, d’un phénomène, par l’évaluation du nombre de chances d’en obtenir la réalisation. Selon le mathématicien français Henri Poincaré (1854-1912) : « La probabilité d’un événement est le rapport du nombre de cas favorables à cet événement au nombre total des possibilités ». On relèvera la probabilité forte, faible ou nulle c’est-à-dire impossible. Donc, des outils mathématiques comme le calcul des probabilités, la théorie des ensembles, la théorie des groupes ou la notion d’ordre sont capables, dès lors qu’ils sont intégrés dans des modèles appropriés et appliqués par des hommes compétents, sinon de neutraliser, du moins de compresser l’envergure des risques et catastrophes et leurs conséquences désastreuses sur les personnes, les biens et l’environnement.

Figure
Les processus continus sont des études mathématiques de l’espace, du temps et de l’ensemble des nombres réels (R) ; les processus discontinus réguliers étudient l’analyse mathématiques (calculs différentiel, intégral, infinitésimal), l’étude du travail, du capital, les variations saisonnières d’un phénomène économique, et de l’ensemble des nombres entiers naturels (N) ; les processus discontinus irréguliers qui nous intéressent en premier lieu étudient les risques, les catastrophes et autres sinistres. Dès lors, la question majeure qui reste alors posée est celle de savoir comment éviter ces risques, catastrophes et autres sinistres. Il faut bien entendu des recherches très poussées dans le domaine, il faut avoir de l’argent, suffisamment d’argent, un budget propre et suffisant, il faut des hommes et des compétences, des hommes qualifiés dans les domaines appropriés et des chercheurs et spécialistes en matière de risques et catastrophes. Il faut aussi de la technologie, de l’informatique, et des mathématiques, beaucoup de mathématiques : statistiques et probabilités, théorie des ensembles, théorie des groupes, géométrie algébrique. Il faut aussi et surtout des hommes politiques qui veulent bien opter pour cette politique, cette orientation saine, éthique et responsable.

Conclusion : Alerte aux risques, transversalité des dégâts et urgences des
solutions
Ce qualificatif si précieux : « l’Etat, bon père de famille ! » est-il toujours valable ? Ou alors à reléguer au musée à côté du silex taillé, de la hache de pierre et du rouet ? L’homme est créé non pas pour domestiquer la nature mais pour la respecter. Les animaux étaient présents sur terre plus de 100 millions d’années avant l’homme. Même les Pays-Bas qui se sont battus pendant des siècles contre la mer et les fleuves (le Rhin, la Meuse et le Waal) en repoussant les flots, en les canalisant, en les domestiquant sont aujourd’hui obligés, en raison du changement climatique et de la montée des eaux, de redonner plus d’espace aux fleuves, de rendre à la mer les surfaces qu’ils lui ont prises et revoir leurs rapports à la mer et l’eau, l’eau qui va reprendre ses droits (L’histoire des Pays-Bas, 1953, sur le Web ; Le Monde du 3 avr. 2007).

Conscient de l’importance de la pollinisation et la fécondation des plantes par les abeilles et de la corrélation entre l’homme, la faune et la flore, le physicien Albert Einstein (1879-1955) disait : « Si l’abeille venait à disparaître l’homme n’aurait que quelques années à vivre ». En effet, l’abeille est responsable de la pollinisation de plus de 87 mille fruits et légumes consommés par l’homme, aussi aucune machine créée par celui-ci n’est-elle aujourd’hui en mesure de rivaliser avec ce petit insecte social. Dans la même perspective le météorologue E. Norton Lorenz s’interroge déjà en 1972 : « Le battement d’ailes d’un papillon au Brésil peut-il provoquer une tornade au Texas ?». Ce que résume une chanson en ces termes : « Effet papillon : petit effet, grande conséquence ». Selon Ian Mac Kielland il faut sauver le condor (oiseau rapace d’Amérique), parce qu’en sauvant le condor on arrivera à développer des qualités pour sauver l’homme.

La microéconomie et la macroéconomie se rejoignent, se recoupent au moins sur un point fondamental, le point d’intersection entre l’environnement et l’inégalité. Aussi l’environnement (microéconomie) ne saurait-il être protégé sans en avoir intégré dans son champ d’investigation, dans son « environnement » la dimension socioéconomique, la question des inégalités et des hauts revenus (macroéconomie). Car ceux qui polluent le plus sont, en effet, ceux qui possèdent le plus, et ce quel que soit le niveau de l’acteur économique : ménage, entreprise, administration, association, collectif, Etat. Autrement dit, comment voulez-vous demander à ceux qui sont dans le besoin ou dans le malheur, et ce quel que soit leur niveau et leur espace géographique, de collaborer, d’être solidaire dans l’effort de la protection de l’environnement si, paradoxalement, ceux qui polluent sont ceux qui en ont les moyens, ceux-là même qui rechignent à l’idée de solidarité, à l’idée de cohésion sociale. En conséquence, qui dit milieu et environnement et leurs conséquences écologiques dit aussi inexorablement solidarité et cohésion sociale et ce à tous les niveaux et dans tous les espaces géographiques. Puisque le phénomène de l’environnement, comme tout phénomène social, est soumis à l’effet du ricochet, à la loi de propagation, dans la mesure où il part d’un seul élément, l’épidémie par exemple, ou la sécheresse, pour s’étendre à toute l’unité écologique, à tout l’écosystème : biotope et biocénose, c’est-à-dire le milieu vivant, des hommes et des organismes animaux, végétaux et bactériens qui y vivent.

Les Etats-Unis, la société la plus riche de la planète est-elle vraiment prête à modifier son mode de vie, son « american way of life » très gaspilleur, comme en témoigne par exemple une consommation d’énergie toujours croissante. De même les inégalités et les frustrations sociales grandissantes entre ses différentes couches sociales où les 1% les plus riches gagnent en moyenne 440 fois plus que le salaire moyen des 150 millions situés en bas de l’échelle, ne favorisent nullement la cohésion et encore moins la protection. En France aussi, la réduction des inégalités s’est essoufflée et la cohésion sociale est à l’avenant, puisque la proportion d’individus ayant un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté, pauvreté monétaire (60% du niveau de vie médian) est de plus de 12% en 2005, soit plus de 7 millions (Le Monde du 16 nov. 2007). Aujourd’hui encore la situation ne s’est pas améliorée, au contraire elle s’est même aggravée (14,7%, Insee, oct. 2019). Les inégalités sociales constituent un sérieux obstacle pour la protection de l’environnement. Ainsi la question de l’environnement, responsabilité de l’Etat comme toute question sociale, est-elle régie par la loi de propagation : propagation d’un élément à l’ensemble, d’un phénomène à son environnement ou à tout le système, ou d’un point central à toute la circonférence. On peut l’illustrer dans le schéma ci-dessous où le point du centre représente un agent viral ou une problématique écologique à l’exemple d’une pandémie, Covid-19, qui sévit, aujourd’hui, de la dégradation de l’environnement ou de la détérioration de l’espace par l’un des agents (pollution, nuisance, habitats insalubres, détritus, consommation effrénée de toute sorte de produits, d’animaux ou d’insectes) et leurs conséquences néfastes, problématique qui se propage et s’étend inexorablement à l’ensemble de l’écosystème. Et la responsabilité de l’Etat n’est pas absente de tout cela !

La théorie de la propagation est l’action de se propager, le fait de s’étendre, de se répandre. C’est un processus d’extension, un effet de contagion. Ainsi peut-on relever la propagation de la peur, de la terreur ou du désordre ; de la douleur, de la maladie ou du virus ; du son, de la lumière, de la chaleur, de la fumée ou des incendies ; des nuisances, d’une doctrine, d’une croyance, d’une rumeur ou d’une sensation douloureuse ; la propagation de la crise, d’une technique ou d’un processus pathologique dans l’organisme d’une personne physique ou morale. En effet, rien n’est complètement isolé, rien n’est complètement autonome, tout se tient, tout interfère, tout se propage. Le passé se prolonge dans le présent, le présent préfigure le futur. Le mort saisit le vif, la succession du de cujus, qui peut être l’Etat lui-même, se transmet des descendants à leur progéniture, et ainsi le comportement de l’Etat à l’égard de ces risques et catastrophes doit être apprécié en fonction de celui qu’aurait eu un bon « pater familias », puisque les effets, heureux ou malheureux, de ce type de comportement, de ce type d’emportement sont immédiats sur les personnes, les biens et l’environnement. Aussi la défaillance d’une seule composante peut-elle provoquer l’effondrement de tout le système, comme on peut le constater sur le schéma ci-dessous, un virus, par exemple, le cas du Covid-19, sa dangerosité, son effet de contagion, et la fréquence de sa propagation, ainsi que le degré de responsabilité d’une organisation dans son apparition, la Chine en l’occurrence, sont intimement liés(Jilali Chabih – Pr. de Droit – UCAM -MAROC). Figure 3 : Propagation du sinistre, du virus, de la crise sanitaire et effet de contagion

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