Il est flagrant à Nador et Figuig

· Philosophie et matières islamiques les plus touchées

· Des enseignants payés à ne rien faire

L’ENSEIGNEMENT public au Maroc est un véritable casse-tête. Toutes les réformes qui se sont succédé n’ont pas porté de résultats probants. Moultes déficiences expliquent ce fiasco: les nouvelles pratiques pédagogiques recommandées sont mal maîtrisées et peu vulgarisées; les capacités d’accueil insuffisantes et les nouveautés pédagogiques inappropriées  engendrent un enseignement dysfonctionnel et inopérationnel, très peu adapté aux besoins réels de notre pays.
En matière de capacités d’accueil, en plus de la précarité de l’infrastructure scolaire, les ressources humaines font grand défaut à notre enseignement. Toutes les académies manquent d’enseignants. C’est le cas entre autres de l’académie régionale de formation et d’éducation de l’Oriental. Le fléau est encore plus exacerbé dans les délégations de Nador et de Figuig. Délégations où l’on constate respectivement, pour l’année scolaire 2006-2007, un déficit de 285 et 60 professeurs. Seulement 46 nouveaux instituteurs ont été mutés dans cette région (Nador 27, Figuig 17 et Taourirt 2). A Nador, on signale un manque de 120 instituteurs  outre les 65 professeurs de premier cycle et les 100 professeurs au secondaire qualifiant. A Figuig, le déficit se fait sentir surtout au primaire où il est estimé à moins de 56 instituteurs. Il en est de même pour la délégation de Jerada où les 3 cycles d’enseignements connaissent un déficit atteignant 45 enseignants dont -18 au primaire, -25 au collège et -12 au lycée.
Au secondaire ce sont surtout la philosophie et les disciplines islamiques qui en souffrent le plus. «Le problème est encore aggravé, par les départs en congé de maladie et de maternité et la faible marge de manœuvre des responsables locaux et régionaux pour mieux gérer les ressources humaines», indique Naji Choukri, délégué de l’enseignement à Oujda.
Par ailleurs, on note aussi le vieillissement du corps enseignant. La part des femmes (75%) est aussi élevée. Dans les deux cas les mutations sont difficiles. S’il est possible de muter un enseignant au sein du périmètre urbain d’une délégation, il est difficile d’en muter du milieu urbain vers le milieu rural ou d’une délégation vers une autre. Tout enseignant qu’on charge de combler un vide  loin de chez lui, refuse une telle décision. C’est le cas pour des enseignants de philosophie à Oujda qui sont en surnombre alors que des lycées dans la région ont besoin de 9 personnes.
Au niveau interdélégation, le même déséquilibre est constaté. A titre d’exemple, si à Oujda les enseignants des mathématiques sont en sureffectif, à Nador il faut quelque 70 professeurs.
Aussi, les délégués des 6 provinces ne peuvent que colmater les brèches. On charge des instituteurs licenciés ès-philosophie pour enseigner cette discipline au secondaire; ou des professeurs d’arabe pour les matières islamiques, les maths pour l’informatique et vice versa. Dans le milieu rural, les instituteurs ont des classes à plusieurs niveaux. Classes qui atteignent parfois jusqu’à 50 apprenants.
Toujours en matière de ressources humaines, le manque d’inspecteurs et de conseillers pédagogiques pose de sérieux problèmes pour l’encadrement du personnel enseignant. Pourtant, certains enseignants continuent -et ils sont nombreux- à percevoir un salaire sans jamais mettre les pieds dans un établissement public. Beaucoup exercent dans le privé.
Mohammed Zerhoudi
L’ECONOMISTE