Le français en classe du baccalauréat marocain

La langue française compte parmi les disciplines du type poids lourd avec son coefficient fort et pour être une langue d’enseignement, de communication et de recherche dans les grandes écoles et à l’université aussi bien pour les branches scientifiques et techniques que pour les sections à caractère littéraire ou juridique. L’inscrire à l’examen régional c’est donner le sentiment aux professeurs ,aux élèves et à leurs parents qu’elle a un statut moindre que les matières inscrites à l’examen national, d’où le manque d’intérêt de la part des élèves et les échecs que nous connaissons. Le ministère lui-même contribue à bon escient ou par manque de clairvoyance au désintérêt des élèves pour la langue française, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, le statut de la langue française est ambigu et souffre de beaucoup de contradictions.
La réforme de l’enseignement inscrit la langue française parmi les matières dites secondaires .Une langue secondaire est une langue qui se démarque des autres par la masse horaire hebdomadaire qui lui est attribuée, par le volume de son coefficient, par le poids de ses programmes et pour finir, par son inscription à l’examen régional et non à l’examen national. Mettre sur le même pied d’égalité la langue française avec un coefficient qui varie entre 3 et 4 avec les autres matières qui ont 2 ou moins pour coefficient c’est reconnaître explicitement que toutes les matières devant être passées en classe de première année du baccalauréat sont d’égale importance, et par conséquent de moindre importance que celles à passer en classe de terminale.
Aligner la langue française avec une masse horaire hebdomadaire de l’ordre de 4 à 5 heures parmi des matières qui n’en ont qu’une ou deux c’est faire signifier à qui veut une explication louche que malgré cela elle demeure une discipline secondaire qu’on ne peut mesurer avec les mathématiques, la physique et la chimie et les sciences naturelles pour les branches scientifiques, ou l’arabe, l’histoire et la géographie pour les branches littéraires qui pèsent par leur poids que leur confère leur coefficient et par leur statut d’être inscrites à l’examen national.
Inscrire la langue française en classe de première année du baccalauréat au lieu de la terminale c’est dire de manière univoque à l’élève, aux parents et aux enseignants eux-mêmes qu’après l’examen régional, le français n’a plus d’intérêt et par conséquent il doit être classé, relégué. Les professeurs à qui seront attribuées les deuxièmes années du baccalauréat doivent-ils considérer ceci comme une aubaine ou comme un supplice ? Cela dépend de la nature de chacun et de ses intentions ; s’il veut travailler comme il se doit avec ses élèves, cela est plus proche du supplice que du plaisir. Pourquoi donc ? Pour la simple raison que les élèves n’ont ni l’intention ni la volonté de travailler. Disons-le clairement : la classe de français en terminale est une classe sans doigts. Pour eux tout est fini avec la fin de l’examen régional ayant sanctionné la deuxième année du baccalauréat. Ils ont déjà en main une partie du taux de réussite ou d’échec à l’examen final. Les élèves viennent avec l’idée (fausse ou vraie ,c’est à discuter) que tout est terminé, que leur sort est scellé avec l’examen régional et que leur présence en classe de français est purement formelle. S’ils sont en classe de français c’est parce que le système scolaire le veut, autrement, les heures qu’ils ont à passer en classe de français, ils les passeraient à préparer les matières de l’examen national, chacun à sa façon et selon ses moyens, qui en groupes de travail entre amis ou copains, qui en heures de rattrapages devenues la clé da la réussite pour ceux qui les donnent comme pour ceux qui les reçoivent. Les élèves eux aussi sont à plaindre. Que peut faire un élève dans une matière qui ne lui rapporte plus rien à l’exclusion de la maigre note du contrôle continu ? Cette note du contrôle continu, mérite-t–elle tout le sacrifice que les élèves lui accordent ? La seule présence en classe de 4 à 5 heures par semaine est déjà un lourd tribut.
Ainsi en est-il de l’amère réalité du français en classe de baccalauréat. Mais une fois franchi le seuil de la terminale, les élèves se retrouvent nez à nez avec cette matière que les programmes ont jusqu’alors méprisée. Elle prend sa revanche et se venge sur les élèves eux-mêmes et sur le système scolaire qui l’a bannie de la liste des matières principales.
Même ainsi considérée, elle fait basculer les résultats des élèves vers les échecs. Nous avons encore en mémoire les résultats de l’examen régional de l’année 2007 pour l’Académie de l’Oriental (voir : ‘’Les élèves et l’examen régional du bac’’ du 10-07-2007 sur /oujdacity.net/ » target= » »_blank » onclick= » »return »>oujdacity.net)
Mettre la langue française dans la même balance avec des matières poids plume par la masse de leur programme constitue un acte contraire au bon sens qu’il enfreint et auquel il s’oppose. Il est une évidence qu’on ne peut ignorer le poids de la langue française avec ses quatre romans par année scolaire, (vacances et jours fériés compris), et pour les élèves et pour les professeurs des classes de première année. Que faut-il donc faire pour redresser le tort fait à la langue française en classe de première année du baccalauréat ? Deux possibilités s’offrent :
a- Si l’on envisage la langue française comme une langue secondaire, il convient de :
-Réduire sa masse horaire ;
-Réduire ses coefficients ;
-Alléger ses programmes ;
-Arabiser l’université.
b- Si, au contraire, on l’envisager comme une langue principale, il convient de :
-Laisser les choses telles qu’elles sont en matière d’horaire, de coefficient et de programme ;
-Mais l’inscrire à l’examen national.
J’ai la conviction que le statut de la langue française est mal défini en classe de lycée marocain. D’un côté, elle a un coefficient et une masse horaire forts avec un programme bien fourni, et de l’autre, elle est classée parmi les matières de second rang et inscrite à l’examen régional. Cela constitue à coup sûr une contradiction et un contresens qu’il faut corriger.




8 Comments
merci pour cet article,ce que je veux ajouter a vos suggestions ,c est enseigner les matieres scientifiques en francais.
Intéressant comme sujet
Actuellement étudiant, et après avoir pris de recul sur l’enseignement secondaire ,je pense que le problème ne se pose pas seulement au niveau de l’évaluation mais plutôt plus dans la manière dont elle est enseignée : pas assez d’exercices oraux ,les cours sont très académiques ,manque de pédagogie chez certains prof, (80% d’arabe dans un cours de français ).Je pense que dans ce genre de matière les prof ont un grand rôle à jouer .
Je rejoins M. l’enseignant en lui donnant raison et j’ajouterais, pour ma part comme argument que depuis que les matiières scientifiques ont été arabisées, le français en sa qualité de langue de recherche scientifique a perdu sa place dans notre cursus scolaire et professionnel. Aussi les étudiants ayant un penchant pour les études scientifiques se trouvent-ils décontenancés une fois arrivés à l’université ou au monde de l’emploi.
c’est une alternative à envisager mais il ne faut pas laisser les choses telles qu’elles sont, car rien ne va plus pour la langue française au lycée. Et merci pour cette remarque.
c’est une alternative à envisager mais il ne faut pas laisser les choses telles qu’elles sont, car rien ne va plus pour la langue française au lycée. Et merci pour cette remarque.
Cher collègue;
Il est une évidence que le français a reculé de distance astronomique par rapport à sa position d’hier.Viens voir (comme dit l’autre en arabe dialectal) ce qui se passe pour l’arabe- même que l’on considère comme langue nationale et que la Constituion et la Charte mettent en exergue : quoique « poids lourd » par le coefficient, cette langue maternelle est arrivée à ce que disait معروف الرصافي رحمه الله
Le problème à mon sens n’est pas celui de coéfficient ou de place , il est plus général:
-Chacun de nous ( ‘toute personne appartenant au domaine del’éducation » s’entend) sait que l’éducation (le mot doit être compris sous sa charge intrinsèque en arabe) est absente dans notre système éducatif, malgrè les ambitions des textes officiels.
-Nous avons renversé l’ordre des choses:
1-depuis la maternelle jusqu’au collège, en passant par le primaire, l’élève est allourdi par les programmes et le cartable -sans niveau et sans formation- pour descendre enfin au lycée comme vous le trouvez.
2- le rôle éducateur de l’enseignant est minimisé par :
-l’imposition de presque tout
-l’abence de formation qui réponde à ce que est l’élèvede notre « écolé »( marocain , musulman, …..)
De ce dernier point on peut comprendre le labyrinthe de problèmes que vit notre action noble qu’est l’enseignement.
merci b1 pour cet effort, mais certains éleves sont nulles en production écrite, et on doit les conseiller
la place du français dans l’enseignement devrait être un sujet de discussion au niveau national et il faut se poser les vraies questions .
le débat devrait être fait par les professionnels de l’économie et les responsables de l’enseignement y compris les professeurs , loin des influences démagogiques et nationalistes qui ont conduit à la situation actuelle.
est ce que l’arabisation de l’enseignement scientifique a été une erreur :alors on doit corriger ou y mettre fin
est ce que au contraire , elle était bénéfique , alors il faut foncer droit dans l’arabisation et laisser tomber le français.
pourquoi se dire que nous sommes des pigeons mais nous devons pratiquer la marche des corbeaux?
depuis trois décennies, le bac marocain ne cesse de reculer, il a perdu sa valeur au niveau international, et il faut que chaque bachelier perde une année après le bac pour se remettre à niveau.l’enseignement supérieur au maroc a beaucoup reculé car les élèves de première année ne comprennent pas le cours donné en français, le prof est alors obligé de ralentir et donner un cours allégé …
je me demande aussi quelle est l’utilité de la langue arabe et de tarbia islamia en classe terminale des sciences math, est ce que ce futur ingénieur sera chargé de diviser l’héritage ou d’intervenir dans des affaires de divorce et pourquoi les notes du français peuvent atteindre 18/20 et la note de l’arabe ne peut pas dépasser 13/20 . est ce que tous les profs d’arabe n’aiment pas leurs élèves ou tous les élèves sont juste moyens en arabe alors qu’ ils peuvent être excellents pour toutes les autres matières, y’ a t il un barème ou on peut avoir 20/20 en arabe?
Si on veut former des scientifiques , il ne faut pas leur faire perdre leur temps dans des matières qui ne leur seront d’aucune utilité scientifique, et ces matières devraient cesser de figurer en terminale, et au contraires renforcer les langues étrangères qui sont la clé de la communication et de l’ouverure sur le monde.
En conclusion: il faut se demander pourquoi tant de marocains se dirigent vers les écoles privées d’apprentissage du français ? Pourquoi à Casa et à Rabat tous les cadres (y compris les ministres) envoient leurs enfants dans des écoles type français? alors si ces cadres sont convaincus que l’arabisation est bonne pour les marocains, à eux de donner l’exemple et de d’envoyer leurs enfants dans des écoles publiques où cette politique d’arabisation est pratiquée.