Sommes-nous des montures naturelles?

Il est une fatalité que nous soyons devenus par la force de l’usage la monture préférée et recherchée de certains chefs d’Etat ou de gouvernement occidentaux, après l’expiration, dans la douceur ou dans la tourmente, de leur mandat. Pour mieux éclairer le fond vaseux du problème, je donnerai deux ou trois exemples empruntés à l’univers de la politique et de la diplomatie à l’échelle internationale. Vous connaissez sans aucun doute Jimmy Carter pour avoir été Président des Etats-Unis ; James Baker, Secrétaire de l’Etat et du Trésor des Etats-Unis il y a quelque temps et Tony Blair, le récent ex- Premier Ministre de Grande Bretagne.
A la fin de leur carrière dans leur pays, ces personnes sont devenues de fins négociateurs dans d’autres pays. Négociateurs de bons offices ou entremetteurs salaces. Après nous avoir menés tantôt par la terreur, tantôt par la force, ils nous mènent par le dialogue hypocrite et les faux bons offices.
C’est tout un. Ce qu’ils n’ont pas obtenu avec la cravache à la main, ils l’obtiennent la cravache derrière le dos. Ce qu’ils n’ont pas eu en leur qualité de Président, de Premier Ministre ou de Secrétaire d’Etat, ils l’auront en tant que négociateurs : ils négocient dans le sens de l’intérêt de leurs pays, jamais dans celui pour lequel ils ont été nommés. Et par qui ? Par eux-mêmes. Nommés pour nous prendre , jamais pour nous donner. Après avoir fait signer à Sadate à genoux les tristes accords de Camp David de 1978, Jimmy Carter devient négociateur diplomatique et obtient le Prix Nobel de la Paix .Son mandat expiré, James Baker fut pour un certain temps l’envoyé personnel au Sahara Occidental du Secrétaire Général de l’ONU .
Quant à Tony Blair, il est nommé émissaire pour le Proche Orient du Quartet en tant que médiateur entre Israéliens et Palestiniens. C’est à peine croyable ! Qu’attendre de ces loups à peine déguisés ? Blair ne va que parfaire ce qu’un certain ministre britannique du nom de Lord Balfour a promis i l y a de cela quelque 90 ans : la création d’un foyer national juif en Palestine.
Ces gens à noms poétiques avec leurs R qui roulent sur la pointe de notre langue , nous les avons portés sur notre dos alors qu’ils étaient en mandat dans leur pays : ils nous ont dicté ce que nous devions et ce que nous ne devions pas faire, ce qui était en harmonie avec les intérêts de leur pays,les voici de retour :ils sont mandatés dans nos pays et nous dictent encore une fois et comme toujours la conduite que nous devons tenir en telle ou telle situation. Nous sommes faits pour les porter sur notre dos, à peine descendent-ils que d’autres prennent leur place. Ainsi sommes-nous faits.
Il semble que nous avons des dispositions naturelles plus proches de la bête que de l’homme à nous laisser chevaucher. Nous devons avoir, sans le savoir nous-mêmes hélas ! le dos courbé et la stature voûtée, ce qui donne aux autres l’envie de nous enfourcher et rend aisée cette opération .Devons-nous considérer ceci comme un privilège ou comme une honte ? Etre montés par un Blair, un Carter, ou un Baker me paraît plus proche de l’avantage que de l’inconvénient si l’échine est basse, le dos libre et son propriétaire consentant. Ce qui s’applique à l’échelle internationales s’applique également à l’échelle nationale et locale .
Nous servons également de montures aux membres du gouvernement, aux élus du peuple, aussi bien ceux qui siègent au Parlement que ceux qui le font dans les Mairies. Ils se relaient à tour de rôle avec cependant des figures qui reviennent souvent. Seul le poids distingue les uns des autres. Jusqu’à quand devons-nous servir de montures à ces cavaliers corrompus qui nous prennent pour leurs montures naturelles? Il est temps de relever l’échine, de nous redresser, de ruer et de désarçonner ceux qui seraient tentés de nous enfourcher.




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