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Journalisme : nous sommes nos propres ennemis !!!

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 «L’armée israélienne a bombardé les tunnels sur la frontière avec l’Egypte en réponse à des tirs de roquettes du Hamas…» Cette information colportée le mardi 2 février 2009 par les médias arabes et marocains (chaînes TV et Radio) laisse perplexe  et suscite bien des interrogations sur les sources et les objectifs de l’information diffusée,  comme sur le professionnalisme et l’idéologie des journalistes qui y sont derrière. Décryptage d’une information qui a les relents de la désinformation pure et simple. 
   D’abord, quelques postulats de base avant d’approfondir l’analyse.

1- Il est évident que l’objectif des médias arabes nationaux est d’informer l’auditeur et/ou le spectateur arabe de ce qui se passe dans le monde. Il s’agit donc de lui fournir une information réelle sur les événements qui se déroulent avec leurs circonstances justes, leurs données objectives et leurs détails vérifiés dans un souci honorable de vérité et de justice.

2- Les organes de presse ont parfois leur ligne éditoriale et c’est légitime. Par là, le média s’érige en moyen de pression et d’influence  visant à défendre les intérêts de ses pourvoyeurs et qui sont en principe en parfaite concordance avec ceux du public cible de l’information. C’est le cas des journaux étatiques, de partis, des journaux pro-gouvernementaux … Les journalistes sont tenus de respecter les choix qui  interviennent dans le traitement de l’information au risque parfois de bafouer la vérité et l’éthique même du journalisme.

3- Les arabes, les musulmans mais aussi tous les esprits libres et indépendants de par le monde savent que le conflit arabo-israélien repose sur une lourde injustice et que le peuple palestinien est en train de payer le tribut des exactions commises par l’Occident à l’encontre des Juifs. Il va aussi sans dire qu’à l’époque des droits de l’homme et des pactes et traités internationaux pour l’égalité face à la justice, invoquer la terre promise ou le peuple élu de Dieu en vue de s’attirer la compassion morale ou le soutien financier relève de la supercherie.

Revenons maintenant à l’information diffusée pour poser trois questions. Les arabes se donnent-ils vraiment les moyens humains, matériels, éthiques pour présenter au spectateur arabe une information fiable et formatrice ? Les médias nationaux arabes, ont-ils une ligne éditoriale claire qui participe réellement à la construction d’une idéologie arabe ? Les journalistes arabes, ont-ils le profil requis et la liberté de manœuvre nécessaire pour intervenir face à une information en discordance avec le projet de société arabe ?

L’étude prospectrice de l’information citée relève, qu’à défaut d’avoir à leur disposition une agence de presse arabe et/ou des agences de presse nationales dignes de ce nom et donc capables de les alimenter en informations fiables et formatrices, les médias nationaux ont recours aux agences de presse internationales qui modèlent l’information selon une optique d’intérêt mise au service d’un projet de civilisation très vaste. Il apparaît clairement aussi, et à l’exception des cas relatifs aux conflits interarabes, que les médias arabes n’adhèrent pas à une même idéologie construite sur une pensée commune et en conséquence ne s’accordent pas pour parler un même langage. Ce qui est en outre très manifeste,  et vu les modes de recrutement, les systèmes de formation et les conditions de travail dans des pays où la liberté d’expression est bannie, c’est que le journaliste arabe, étant rôdé à s’autocensurer sur de petits sujets d’ordre local n’arrive plus à censurer une information nuisible sur l’esprit du citoyen arabe au sens le plus large.

Car comment expliquer qu’on cite sur des médias arabes « l’armée israélienne » de façon apparemment neutre mais au fond tendancieusement favorable à l’entité juive, sans mentionner que c’est une force d’occupation qui est en train d’agresser injustement le peuple palestinien ? Comment expliquer aussi que l’information parle de « bombarder les tunnels » comme si c’est juste un petit exercice de routine et comme si l’existence de ces tunnels a été vérifiée de visu et sur le terrain par les journalistes de ces médias arabes et surtout comme si les bombes ne ciblaient que les tunnels en épargnant la vie des êtres humains ? Comment expliquer enfin que les bombardements sont présentés par ces médias nationaux arabes comme étant une réponse de la part d’Israël aux roquettes du Hamas et non pas le contraire, puisque le Hamas riposte par sa résistance légitime aux agressions répétées de l’armée sioniste, à son blocus et à son refus constant d’appliquer le droit international ?

Si rien ne justifie la diffusion d’une telle information sous ces coutures, on ne peut expliquer tout cela que par l’incompétence criante et l’étourderie malavisée du journaliste arabe. Bien sûr il ne faut pas généraliser et pour cause, il y a bien des journalistes professionnels et des médias arabes qui ont réussi à percer et à porter la voix arabe dans le camp occidental même. Toutefois, ils sont peu nombreux et leur impact sur la scène interne reste limité. Le monde arabe, dépassé par l’explosion de l’information et de l’audiovisuel s’est lancé sans préparation dans une course perdue d’avance. Les chaînes pullulent, et au lieu de produire l’information selon des standards respectueux des intérêts arabes ou au moins de se donner le temps de traiter toute information recueillie par une analyse minutieuse pour éviter les dérives, les journalistes font du remplissage en glanant les contenus de leurs bulletins  dans les agences de presse occidentales. Ce conditionnement auquel se plient le journalisme arabe en consommant puis en recyclant une information fabriquée par d’autres avec des objectifs contraires à nos propres intérêts  est très dangereux. Par ce biais, nous devenons nos propres ennemis. L’information citée en est le témoignage poignant.

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