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Le récit répétitif dans la Boîte à Merveilles de Ahmed Sefrioui

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Ecrit par Zaid Tayeb
Le récit répétitif s’identifie par son caractère de reprise. Ainsi, dans un récit répétitif, la même histoire se répète autant de fois que possible : 1H/nR , c’est-à- dire que la même histoire est racontée plusieurs fois.
En guise d’illustration pratique, je soumets aux lecteurs deux histoires prélevées du roman la Boîte à Merveilles de Ahmed Sefrioui inscrit au programme des classes des premières années du baccalauréat marocain : celle de Moulay Larbi relative au litige l’ayant opposé à son associé Abdelkader, et celle de Lalla Aicha qui relate sa contribution dans la remise en marche de l’atelier de son mari. On s’aperçoit bien vite de la manière dont les différents narrataires aussi bien intra diégétiques qu’extra diégétiques prennent connaissance de ces deux histoires.
A- Récit du litige de Moulay Larbi avec son associé ( chapitre IV, page 62-70) : 1H/nR( une histoire, plusieurs récits) : la même histoire est racontée plusieurs fois.
1- Le narrataire intra diégétique.
a- Du narrateur Moulay Larbi au narrataire Lalla Aïcha :(Moulay Larbi( page 62)…..de fleurs mauves et…page 64). Les invités de Lalla Aicha, à savoir Lalla Zoubida et son fils Sidi Mohammed, restés seuls dans la chambre de réception, n’entendent rien de ce que dit Moulay Larbi à sa femme, qui est allée à sa rencontre pour le retrouver dans la deuxième chambre qui sert également d’entrepôt :’’Un murmure confus, entrecoupés de silences, bourdonna dans la petite pièce. Il dura longtemps ( page 63)’’ Le mari parti, sa femme alla rejoindre son hôtesse et son fils.
b- Du narrateur Lalla Aïcha au narrataire Lalla Zoubida : ‘’Lalla Aicha vint nous retrouver (page 64)……je ne tardais pas à m’endormir (page 66 )’’. Sidi Mohammed, en sa qualité de narrateur attitré est interdit du droit d’écoute et de participation à la discussion entre sa mère et Lalla Aicha venue les rejoindre après le départ de son mari. (‘’ Elle fit signe à ma mère de la suivre dans le coin le plus sombre de la chambre’’ (page64)…Ma mère discutait à demi-voix avec son amie’’(page64). Tout ce que le narrataire intra diégétique Sidi Mohammed et le narrataire extra diégétique qui est le lecteur peuvent retenir de cette scène, c’est que Moulay Larbi a ramené de mauvaises nouvelles à sa femme (‘’ Lalla Aicha vint nous retrouver, le visage bouleversé’’ (page 64)…’’Lalla Aicha se mit à pleurer silencieusement. Elle se cachait le visage dans la manche de sa robe et reniflait’ ’(page  65).
2- Les narrataires intra diégétiques et extra diégétiques
c- Du narrateur Lalla Zoubida aux narrataires intra diégétiques Maallem Abdeslam et son fils Sidi Mohammed et au narrataire extra diégétique, le lecteur. (  ‘’ Ma mère soupira. Elle s’adressa à mon père (page 67)….Elle souffrait de violents maux de tête (page 70).
Ce n’est que le lendemain vendredi que les différents narrataires aussi bien intra diégétiques qu’extra diégétiques prennent connaissance de l’histoire de Moulay Larbi qui se résume dans un litige entre celui-ci et son associé que le narrateur Lalla Zoubida raconte dans ses plus petits détails tout en prenant parti contre Abdelkader.
L’histoire de Moulay Larbi est racontée plusieurs fois et par trois narrateurs différents : Moulay LarbiàLalla Aichaà Puis Lalla AichaàLalla Zoubida, enfin Lalla ZoubidaàMaallem Abdeslam. Elle a donc cet aspect :
Récit 1 : Moulay Larbi raconte à Lalla Aicha son différend avec son associé Abdelkader
Récit 2 : Lalla Aicha raconte cette histoire à son amie Lalla Zoubida
Récit 3 : Lalla Zoubida la raconte à son mari. Ce n’est qu’à ce niveau de la narration que Sidi Mohammed et le lecteur prennent connaissance de la teneur de l’histoire.
Ce n’est donc qu’au niveau 3 du récit que le narrataire intra diégétique qui est en même temps un narrateur attitré, et les narrataires extra diégétiques, à savoir les lecteurs, prennent connaissance des détails du litige qui a opposé Moulay Larbi à son associé Abdelkader. Comme le lecteur averti peut bien le constater, Lalla Zoubida spolie au narrateur attitré le droit à la narration. Elle raconte dans ses menus détails le différend de Moulay Larbi et de son associé tout en prenant parti contre ce dernier qu’elle qualifie de caractérisants péjoratifs et insultants du type :’’le fils du péché, le fils de l’adultère, le disciple de Satan qui ne possédait pas même une chemise propre…’’et bien d’autres qualificatifs dévalorisants.

B- A- histoire de Lalla Aichaqui se dépouille de ses biens pour remettre en marche l’atelier de son mari Moulay Larbi ( chapitre V,  Fatma Bziouya  (page 79)…..Allah l’Omnipotent (page 82 ) : 1H/nR( une histoire, plusieurs récits) : la même histoire est racontée plusieurs fois. Ce récit adopte le cheminement suivant qui n’est guère différent du premier.
1- Du narrateur Lalla Aicha au narrataire intra diégétique Lalla Zoubida( Récit non relaté dans le roman mais suggéré par les nombreuses allusions du type :’’Lalla Aicha, son amie, est venue la chercher…Cette sortie avait certainement une relation quelconque avec l’affaire Moulay Larbi, le mari de Lalla Aicha…(page 79). En effet, le narrateur Sidi Mohammed sorti du m’sid n’a pas trouvé sa mère à la maison, celle-ci est partie chez son amie que celle-ci est venue chercher. Les deux femmes peuvent donc parler à leur aise sans se chuchotement.
2- Du narrateur Lalla Zoubida au narrataire Fatma Bziouya qu’elle rencontre sur le palier : ‘’ Ma mère, mystérieuse, lui fit promettre la plus grande discrétion. Ensuite, elle se lança dans un long discours chuchoté de bouche à oreille… (page 80)
3-Du narrateur Lalla Zoubida aux narrataires intra diégétiques Rahma et Sidi Mohammed et aux narrataires extra diégétiques le lecteur : ‘’Ma mère disparut. Je savais qu’elle chuchotait quelque part à Rahma, la locataire du premier, la nouvelle histoire de Lalla Aicha, après lui avoir fait promettre le secret’’ (page 81).
Comme les lecteurs peuvent bien le remarquer, Lalla Zoubida veut étendre son empire ( le monopole) sur le récit en faisant promettre à ses auditrices ou narrataires Fatma Bziouya et Rahma ‘’la plus grande discrétion (page 80) et ‘’ le secret’’ ( page 81) tout en excluant le narrateur Sidi Mohammed du droit d’écoute : ‘’un long discours chuchoté de bouche à oreille (page 80) et ‘’je savais quelle chuchotait ( page 81).
L’histoire de Lalla Aicha est racontée plusieurs fois et par deux narrateurs différents : Lalla AichaàLalla Zoubidaà Puis Lalla ZoubidaàFatma Bziouya, enfin Lalla ZoubidaàRahma.
Conclusion : Le récit répétitif dont il est fait usage dans la Boîte à Merveilles permet aux différents narrateurs de faire circuler l’information au compte gouttes jusqu’à sa destination finale qui est le lecteur. En effet, ni le narrateur attitré Sidi Mohammed, ni le lecteur ne prennent connaissance de la teneur des deux histoires relatives toutes deux à Moulay Larbi qu’au niveau trois de sa narration. Ce qui permet de tisser l’intrigue.

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2 Comments

  1. said
    18/11/2012 at 14:59

    merci becau

  2. Amina
    20/11/2012 at 20:55

    Merci bcp prof :)

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