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Ahfir, Berkane; Sidi Mimoune, Grimpez!

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 Une invitation pour visiter un bout du royaume des saints ; pas celui de zouanate, un petit bout d’un monde voilé par le sacré et le mystérieux : une ceinture maraboutique qui ceint ma cité : Deux saintes et sept saints. Comme les portes de Paris, près du périf, se sont installés ses hommes et femmes, prolongeant notre monde par le mystique, et le mythique. Ses sacrés saints qui ne sont qu’une étape d’une longue évolution du fait religieux, où l’approche historique ne suffirait pas. La psychologie, la phénoménologie, l’eschatologie, l’herméneutique, l’ethnologie, l’historicisme, l’histoire des religions, la théologie comparée sont le cadre des champs conceptuels inhérents à notre sujet : D’où viennent ils (elles), quelle est leur fonction psycho -socio -religieuse ? Y’aura-t-il d’autres canonisations ? Ou alors, l’espace serait saturé, puisque tous les points d’eau, les flancs ombragés des rivières ; les vallées et les gorges verdoyantes sont occupés.

Sidi Azouz, Sidi Mbark ,Sid Almakhfi (l’invisible), Sidi Mimoune, sidi Rahmoune, sidi Ahmed l’oujdi ,sidi ahmed l’haddad (le forgeron), font partie de la mémoire collective de notre cité. La sacralité du chiffre Sept est primordiale : sept cieux, le septième jour, les sept péchés capitaux, les sept tours autour d’Alqâba,… Les sept merveilles du monde, Blanche neige adoptée par les sept nains et sauvée par un baiser princier qui incarnerait symboliquement le pouvoir divin une fois roi. Lalla hlima Almarjia et Lalla Fatna, elles ne sont que deux: phallocratie oblige. Comme vous remarquez, deux saints ; se suivent et portent le même prénom Ahmed, cela poserait problème d’interférence dans le champ religieux ; pour les distinguer ; les autochtones leurs ajoutèrent un non (l’un serait devenu forgeron, l’autre probablement venu de Oujda). L’emplacement des saints,est lié à la fertilité et l’abondance, les coins mystifiés, intégrés comme représentations collectives pour trouver un sens à la vie et la rythmer par les récoltes et des moussems (Alwaâda). Avant ce serait l’abondance qui crée les marabouts, mais une fois « crées » ,l’inconscient collectif alterne les genèses  pour que le sacré s’installe autour de symboles et de mythes nécessaires pour le fonctionnement du groupe(tribu). D’ailleurs quand la nature fût vierge, l’homme n’ y était pas, et de cette nature que l’homme créait ses mythes pour comprendre la mort et l’apprivoiser (montagnes lacs mers, vipères, arbres…). Découvrant la sexualité et la mortalité, il partit à la recherche de(s) sens : Le sens de l’existence ; le destin et les origines lointains liés à sa vie sur terre.

Sidi Mimoune, lieu de psychothérapie, centre d’internement provisoire : Des cas de schizophrénie, de dépressions, d’AVC suivies d’hémiplégie. Pour s’ y rendre, il faut prendre la direction Berkane et juste avant Roche-porc vous prendrez une piste à droite de la nationale, elle vous mènera au «temple». Le mausolée domine les quelques maisons éparpillées ça et là, est entouré de chambres exiguës très mal entretenues : des puces pullulent dans les plafonds, des marmites souillées par la fumée, des théières soudées et ressoudées, des verres nains ,des tables basses pleines de crasse ;des nappes d’Alfa monochromes usées par les bassins squelettiques ou charnus des fous et des folles qui finiront par se confondre avec les lieux hantés,bien surveillés par le marabout. D’autres se rendent à sidi Mimoune chaque année pour LA Dmana (une promesse tenue) en sacrifiant un Coq, virile, «majuscule», beau ou un bouc noir. La couleur et le sexe de l’offrande sont très riches en symboles ,dans ce cas on a affaire à un sacrifice propitiatoire dans l’objet sacré est marqué par le signe phallique (circoncision, sacrifice animal), symboliquement le sacrifice de l’autre préserve le phallus. Une poule ou une chèvre ne fera pas l’affaire, ce qui signifierait une discrimination féminine largement observée dans notre société arabo-musulmane.

Des dépressions, des névroses, des craquements sous l’effet du stress et des coutumes, pourraient faire le cas de rétablissement, à condition d’y croire (l’intention). Mais des psychoses graves n’ont jamais été «soignées» par la baraqua du marabout. Pour authentifier la sacralité des lieux le fis du Moqadem (le tenancier du mausolée) buvait du pétrole à lampes et mangeait du sel… Adossant les murs faisant face au marabout, de vieux ados,mal rasés et mal élevés, dévisagent les femmes,en fantasmant, ils les déshabillent pour déduire leurs silhouettes en plein jour, et sans l’aide de Satan , les scannant pour contrebalancer le poids de la misère sexuelle et le manque de mixité. Devant l’ignorance, la complexité de la maladie, l’Homme a toujours essayé de trouver un système explicatif qui aurait une fonction affective plutôt que cognitive, cela fonctionne inconsciemment et se transmet d’une génération à l’autre depuis les origines chargées de mythes et de symboles.. Faute de confrère dans la région Sidi Mimoune est devenu célèbre. Un voyage collectif d’esprits souffrants, à la recherche du salut. Peut être que notre marabout saurait décoder les symboles et emprisonner les jins. La ceinture sacrée servirait peut être à quelque chose, mais elle se serre et se resserre autour du rationnel qui dérange pas mal de fous de ma ville.

Corbeau

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2 Comments

  1. Said
    14/09/2010 at 13:11

    Réflexion intéressante, j’aurai aimé en savoir un peu plus notamment sur l’apparition du phénomène marabout. Ahmed l’oujdi du nom d’Oujda?, Ahmed Aberkane du nom de Berkane?, précédent-ils la création de ces villes? Les marabouts à deux tombeaux (Abdelmoumen boukabrayen:au deux tombeaux, près de Berkane et près de Nadroma en Algérie). Les marabouts d’origine juive et qui sont vénérés par les musulmans…
    Avez-vous des références bibliographiques à recommander?
    Merci pour vos contributions rationnelles et éclairantes.

  2. Corbeau
    18/09/2010 at 01:02

    Quelques références bibliographiques;
    Basset,Henri,1920,le culte des grottes au Maroc,Alger:impr.laTypo-l-Lithoet J.Carbonrl.
    Ben-Ami,Issachar,1990,Cultedes saints et pèlerinages judéo -musulmans au Maroc,Paris:Maisonneuveet Larose.
    Chikhaoui,Naïma,1999, »La sainteté féminineface à l’occultationdes femmes:quels sens »,in Histoire des femmes au Maghreb face à l’exclusion,Séries colloques et séminaires, n 5,Publictionsa de la Faculté des Lettres et des sciences humaines de Kénitra..
    Gellner,Ernest,-1969,Saints of he Atlas,Chicago:The University of ChicagoPress.
    Hammoudi Abdellah,-1980,Sainteté,pouvoir et société aux XVII ET XVIII siècles,Annales ESC? Mai ,Août
    -1988;la victime et ses masques: essaisur le sacrifice et la mascarade au Maghreb,Paris:Seuil.
    -Jamous,Raymond ,1981 ,Honneur et baraka:Les structures sociales traditionnelles dans le Rif,Paris,éd,de la Maison des Sciences de l’Homme.
    Rachik, Hassan,-1990,Sacré et sacrifice dans le haut Atlas Marocain Casablanca:Afrique orient;

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