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Le destin des personnages de fiction  »d’Antigone » est à l’image du destin des personnes de chair

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Le destin des personnages de fiction  »d’Antigone » est à l’image du destin des personnes de chair

Par:Zaid Tayeb

Le destin, n’est-il pas ce qui est écrit sur les registres de Dieu, selon l’entendement étroit des hommes, et gardé soigneusement par Lui hors de la connaissance de Ses créatures et dont Lui seul a la clé ? S’il en est ainsi, le destin s’accomplit de manière indépendante de la volonté des hommes qui le subissent dans la résignation totale ou dans de vaines et inutiles tentatives de le contourner, de le modifier ou le conjurer. Mais peut-on modifier, contourner ou conjurer ce dont on ignore le pourquoi, le comment, le où et le quand il va arriver ?  C dont on ignore le contenu et la consistance ? Si le destin est pour les humains ce qui est écrit sur les registres de Dieu, pour Antigone, le destin est ce qui est écrit dans le Prologue où il est dit qu’elle est faite pour transgresser la loi et mourir. On pourrait donc considérer l’acte d’enterrer le cadavre de Polynice par sa sœur Antigone comme une acte allant dans le sens de l’accomplissement du destin dont les fondements ont été énoncés dans le Prologue, et les tentatives des autres personnages de la tragédie d’empêcher Antigone d’accomplir cet acte comme des actes désespérés de vouloir rendre nul cet accomplissement. De plus, le Chœur, en comparant entre le drame et la tragédie a dit que dans celle-ci, il n’y pas d’espoir, que tout est joué d’avance, puisqu’il relève du domaine de l’impossible à modifier, pareillement au destin des hommes. Le Prologue, si l’on veut bien considérer que le Prologue est le registre dans lequel est transcrit et consigné ce qui va arriver et qu’on n’apprend qu’une fois qu’il est arrivé ou consommé, serait donc une réplique concrète ou un exemplaire humain à l’image des registres de Dieu où sont transcrits les destins de chacun et qu’aucun être de chair ne peut ni voir ni prédire. Cependant, si chacun a son propre destin, les destins s’enchevêtrent et dans leur enchevêtrement inextricable, ils agissent les uns sur les autres. Ainsi donc, le destin d’Antigone, s’il s’accomplit comme il est déclaré dans le Prologue, entraîne dans son sillage ceux d’Hémon et d’Eurydice.

Toujours est-il que,, sans le vouloir et sans le savoir, certains personnages influents tentent d’ empêcher l’accomplissement du destin d’Antigone  qui est de mourir et de provoquer la mort d’autres.

1- Ismène d’abord : ‘’Tu es malade ?’’(page 22)…’’Pauvre Ismène !…’’ (Page 31) et ‘’Antigone ( Page 45)…Antigone(Page 46)’’

Dans ces deux scènes qui se complètent et que séparent la scène d’Antigone et la nourrice et celle d’Antigone et Hémon, les deux sœurs délibèrent sur la conduite à prendre face à la loi de Créon et au devoir d’enterrer leur frère Polynice resté sans sépulture. Malgré toute sa bonne volonté pour convaincre sa sœur de ne pas commettre cette folie, étant donné que le rapport de force est à leur désavantage, usant tantôt d’arguments logiques, tantôt psychologiques, Ismène se heurte à la fermeté de sa sœur bien décidée à enterrer le cadavre de leur frère. Mais peut-on convaincre quelqu’un de ne pas faire quelque chose alors qu’il l’a déjà fait ? Antigone apprend à sa sœur qu’elle a accompli son devoir en enterrant de nuit le cadavre de Polynice.

2-Ensuite Hémon :’’Pardon, Hémon (Page 37)…C’est fini pour Hémon, Antigone.(Page 44)’’

Hémon, dont le destin se trouve étroitement lié à celui d’Antigone ignore pourquoi Antigone refuse de l’épouser après lui avoir avoué qu’elle l’aimait, qu’elle avait volé à sa sœur la robe, le maquillage, le parfum et le rouge à lèvre pour attirer sur elle son attention, qu’elle voudrait bien l’épouser et avoir de lui un garçon. Il ne sait pas que dans le Prologue il est dit qu’il ‘’ne devait jamais exister de mari d’Antigone sur cette terre et que ce titre princier lui donnait seulement le droit de mourir.’’ (Page 11).

3-Puis Antigone elle-même : Antigone a accompli son devoir en enterrant une première fois le cadavre de son frère. Malgré la présence de trois gardes auprès du corps, elle a réussi à enterrer son frère sans être vue. Tout juste si les gardes ont trouvé sur le lieu une pelle d’enfant ayant servi à cette fin macabre. Ni vue ni connue. Une opération réussie à perfection et sous la barbe de Créon et de ses gardes ! Elle se rend compte alors à ses dépens que son entreprise est nulle si personne ne la remarque et si elle ne se fait pas arrêter sur le lieu du ’’crime’’. Elle revient donc une seconde fois sur le lieu, et de jour, pour refaire ce qu’elle avait fait de nuit. Ce qui lui a valu l’arrestation et le transfert devant Créon où elle risque de courir gros.

4- Enfin Créon : ‘’As-tu parlé (Page 64)….Appelle tes gardes !(Page 97)’’ : Un long face à face qui occupe plus du tiers de la tragédie,  oppose Antigone à Créon, le devoir à la loi. Créon fait tout ce qui est en son pouvoir pour étouffer l’affaire afin de sauver sa nièce d’une part, et sauver la face aux yeux des citoyens de Thèbes si jamais ils apprennent qu’on a enfreint sa loi. Mais Antigone refuse tous les compromis.

Conclusion. Que l’on admette un seul instant qu’Ismène ait réussi à convaincre sa sœur de ne pas enterrer le cadavre de Polynice, ou qu’Antigone ait accepté de se marier avec Hémon, ou bien qu’elle ne soit pas revenue une seconde fois enterrer son frère  et se faire arrêter, ou encore qu’elle ait accepté les compromis de son oncle qui lui avait demandé de nier  être responsable de l’enterrement de Polynice, que se serait-il passé? Ni Hémon, ni Eurydice. Ni elle ne mourraient et la tragédie aurait emprunté une autre voie que celle énoncée par le Prologue. En conséquence, le destin aurait été faussé, détourné. Ce qui aurait donné à la tragédie un coup sévère puisqu’elle aurait emprunté les voies du drame qui est sujet aux changements et aux rebondissements, aux accidents de parcours. Le Prologue et le Chœur auraient tous deux été enfreints comme la loi de Créon.

Ce qu’il convient surtout de retenir dans la tragédie d’Antigone, à mon sens, c’est la volonté acharnée d’Antigone la fille à tout tenter pour déclencher le mécanisme de la tragédie que les autres personnages voulaient gripper, afin de permettre au destin de s’accomplir tel qu’il a été énoncé dans le Prologue et à la tragédie comme elle a été définie dans le Chœur.

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