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PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT : Quel plan d’aménagement pour le Val d’Ifrane ?

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Connu, étudié, vénéré, visité depuis plus qu’un siècle par les naturalistes du monde entier, le Val d’Ifrane est un haut lieu de biodiversité atlassique marocaine.
Harold Powell, pharmacien anglais à Ifrane jusqu’aux années 50, ainsi que bien d’autres chercheurs, ont découvert et décrit ce site merveilleux avec de nombreuses espèces nouvelles de papillons. Ces joyaux ailés sont venus enrichir une biocénose déjà remarquable et variée de plantes, d’invertébrés, d’amphibiens, de reptiles, d’oiseaux et d’animaux d’eau douce, qui sont l’apanage du Moyen Atlas central et de la charmante ville d’Ifrane, capitale écologique du Maroc.
Les qualités paysagères et écoclimatiques remarquables de cet écosystème accueillant lui ont simultanément conféré un intérêt touristique, notamment national, en raison de sa proximité avec plusieurs métropoles. La renommée de la Source Vittel, de la Cascade des Vierges, des vertes prairies et des berges du cours d’eau de Tizguite, dont l’ombre des frondaisons est si bienfaisante dès les ardeurs solaires du printemps, ont exercé un tel effet d’appel que la fréquentation humaine fut déjà notée comme très menaçante à l’aube des année 1990.
À cette époque, le Val d’Ifrane était déjà victime de son succès. Dès le début de ce siècle, l’avènement au Maroc de l’ère des loisirs et une certaine hausse du pouvoir d’achat, notamment des habitants des grandes villes, ont envahi ces lieux d’un apport qui, durant toute la belle saison et notamment lors des week-ends, a atteint une saturation, inconciliable avec le maintien de ses valeurs naturelles.
Face à un panel incommensurable de saccages et d’éradications, des cris d’alarmes légitimes ont été lancés par des biologistes connaisseurs et amoureux de ces lieux, alertes largement reprises tant par les médias marocains notamment Liberation, le Matin du Sahara et Al Bayane que sur la Toile. Les autorités de tutelle (notamment HCEFLCD, Province, Commune) auraient dû réagir dès lors, mais la gestion de ces lieux s’est poursuivie avec laxisme et sans discernement, attitude d’autant plus paradoxale que l’Oued Tizguit fut dès 1995 classé SIBE humide de priorité 1.
Ces quelques années perdues ont ainsi vu une ruée de visiteurs, à la conduite pour la plupart anarchique et agressive pour ce sanctuaire de la Nature, et des dégâts certains ont été commis, notamment par le piétinement, la pollution visuelle, chimique et sonore, et surtout l’éviction de nombreuses espèces. La récente et judicieuse décision de faire bénéficier le SIBE d’un projet d’aménagement et de protection, afin de concilier le respect environnemental avec un développement durable, notamment dans l’objectif d’une gestion ne reposant plus sur un « champ de foire » mais bien au contraire liée à une fréquentation écotouristique accompagnée, devrait permettre de sauver les beaux restes.
Dans ce sens, il y a lieu de rappeler que dans le cadre du projet de gestion et de protection du Val d’Ifrane et du site de la Source Vittel dont le coup d’envoi a été donné par le premier protecteur de l’environnement au Maroc en général et du Val d’Ifrane en particulier SM Le Roi Mohammed VI lors de sa visite à Ifrane en janvier 2008 et dont les travaux d’intervention d’urgence ont presque pris fin avec la construction du muret de protection.
Un calendrier d’accomplissement des mesures d’accompagnement à entreprendre notamment par le HCEFLCD dans le cadre du PAG du SIBE d’Oued Tizguite traversant le Val devra être établi avec sa chronologie dans un délai de 3 années qui ne doit pas être dépassé pour l’ensemble du Val, en raison de l’état avancé des dégâts qui menacent gravement le SIBE.
Dans ce sens, un Plan d’aménagement et de gestion de ce SIBE, lié à Ifrane mettra en exergue la volonté légitime des pouvoirs publics pour un développement durable et écotouristique, non seulement à l’échelon national, mais aussi à écho international.
Trois mesures essentielles doivent présider à l’ensemble :
– Déplacement bien réussi de la décharge publique d’Ifrane loin des sources d’Oued Tizguite, du SIBE et du Parc National ;

– Création heureuse d’une station d’épuration des eaux usées de la ville pour lutter contre la pollution des eaux de l’Oued Tizguit.
– Integration du SIBE d’Oued Tizguite et son Val d’Ifrane dans la zone du Parc National d’Ifrane à l’instar du SIBE de la forêt de la JABA.
Aussi, ce plan (PAG) devrait-t-il induire de toute évidence la création d’un centre d’accueil environnemental tant attendu encore de nos jours- « et non un kiosque de l’eau comme on le projette» -, tant pour la réception et le conseil des visiteurs, que pour la veille scientifique des pôles de conservation. Le modèle approprié à ce projet est celui de la Maison de l’écologie et des écosystèmes du Maroc (MEEM) proposée par Michel Terrier enthomologiste et grand ami du Val d’Ifrane. Cette Maison de l’écologie et des écosystèmes du Maroc (MEEM) – même en dimension miniature – devra être édifiée comme proposé par l’Association des Amis du Val d’Ifrane soit sur la plateforme déjà existante de l’ex-auberge des jeunes à l’entrée de la piste équestre du Val, soit à l’emplacement de l’actuel refuge mal exploité en tant que Taverne/Bar au pied de la cascade du Val d’Ifrane
L’élection de ce dernier site portant sur le lieu-dit « Le Refuge du Val d’Ifrane » est situé non loin dans le val de l’Oued Tizguid, entre la Source Vittel et la Zaouia de Sidi Abdeslam. Sur 7 ha de disponibilités, la plupart des exigences y sont réunies : accessibilité et notoriété du site (il appartient au patrimoine traditionnel et cultuel régional) ; possibilité d’édification discrète des bâtiments au fil de plusieurs clairières sans la moindre atteinte au milieu ; amplitude d’un parcage mitoyen possible ; biodiversité présente aux proches alentours (aire vitale de plusieurs endémiques) et représentativité écologique : excellente conservation de la forêt (chênes verts, frênes vétérans, peupliers, noyers, ifs, abondance des lianes…), végétation vigoureuse, ripisylves, oued sans grand étiage, plans d’eau, cascades, etc. ; qualité pittoresque de l’environnement ceignant le site (indice paysager) : diversité des formes, contraste des teintes (saisons), amplitude des lignes de fuite, variété de points focaux, présence de curiosités naturelles, d’un cours d’eau et de cascades (« les cascades des Vierges »), agréables frondaisons, collines arborées de chênaie verte sur le flanc ouest, maquis méditerranéen en versant est, falaises calcaires et rochers en surplomb, existence d’un arboretum potentiel (avec vétérans) et d’un riche cortège floristique, point de départ potentiel de nombreux sentiers-découvertes. La nature édaphique du sous-sol (terrains alluviaux calcaires) est de caractère isolant (diélectrique), favorisant la pénétration des ondes à de grandes profondeurs et contribuant à la création d’un milieu tonique.
D’ici là et dans l’attente de voir cette MEEM prendre forme là ou on l’espère, on suggère ces quelques mesures de protection du site dans l’espoir de les voir prises en considération par les décideurs sachant bien que pour la mise en application de la plupart de ces mesures, l’Association des amis du Val d’Ifrane qui doit faire partie du comité de suivi et partie prenante dans l’application de ces mesures propose le dépoussiérage et l’application de l’arrêté municipal du Caïd Driss Ou Raho portant depuis le 19 juin 1929 déjà, règlement sur les conditions de séjour des particulier dans la Vallée de l’Oued Tizguite et qui stipule dans son premier article : La Vallée de l’Oued Ifrane est placée sous la protection des estiveurs, qui sont invités à concourir au respect et à la conservation des sites que la nature y a créés et de conclure dans son article 17 que les agents de la force publique sont chargés de l’exécution du présent arrêté et dire qu’on ne commence de parler de la protection du Val d’Ifrane qu’en 2009 soit 80 ans après la publication de l’arrêté municipal du Caïd Driss Ou Raho .
La première mesure à prendre et sans plus attendre, consiste en la mise en repos définitif (et non temporaire ou alternée), hors de toutes pressions humaines ou pastorales, d’un certain nombre de stations abritant une biodiversité tant quantitative (biocénose déterminante) que qualitative (présence d’espèces floristiques et faunistiques d’exception), et selon la mise en réserve intégrale (surveillée mais non clôturée) d’un maximum de 5 pôles .
La seconde mesure repose sur un vaste programme de renaturation, de régénération et de réhabilitation écologique des espaces dégradés, de restauration des sols, d’assainissement des eaux, de nettoyage des sites jonchés de détritus et du lit de l’oued recouvert de résidus solides, afin de conférer dès le premier printemps un regain maximal de la végétation terrestre, aquatique et émergente.
Les phénomènes d’étiage de certains tronçons et de pollution de l’oued sont aggravés par les pompages des eaux souterraines et la dérivation des eaux pour les besoins agricoles. La flore et la faune d’eau douce en souffrent de manière récurrente et cela explique la régression de certaines espèces.
Le tracé des sentiers (devenus pistes poussiéreuses est à revoir et à gérer. L’essentiel de la rive droite (sauf une encoche limitée pour l’accès à la Source) ne devra comporter que des « sentiers-Nature », la seule rive gauche étant laissée au grand public.
Il faudra veiller à l’instauration d’un balisage et d’une signalétique appropriée, mais attractive. De grands panneaux didactiques, avec un court texte explicatif et les photos de quelques espèces embématiques, sont plantés aux entrées du SIBE, ainsi qu’un autre panneau indiquant le statut de conservation et la conduite à respecter : « il est interdit de…». Et qui doivent être entretenus
D’autres panneaux illustrés et plus modestes doivent etre implantés et signaleront aux habitats ponctuels la présence des espèces concernées. De petits panneaux au sol nommeront in situ les espèces les plus relevantes (nom, brève description). Un balisage permettra l’orientation au fil des différents secteurs d’intérêts du circuit complet du SIBE. Orientation, indications, signalisation, mentalisation, réglementation, interdictions, recommandations, etc…
Afin de ne pas provoquer une mutation anti-démocratique des habitudes, l’accès à des secteurs traditionnels de loisirs populaires comme la Source Vittel proprement dite, ou le Refuge, seront maintenus, mais définitivement circonscrits dans l’espace, sans débordement laxiste des activités récréatives ou marchandes, avec un cahier des charges contraignant pour chacun des acteurs intéressés. La plupart des structures attenantes sont à revoir et à restaurer, certaines à supprimer.
Il est envisageable aussi et surtout de prévoir un seuil de fréquentation à ne pas outrepasser et au-delà duquel le public ne sera pas admis, à la fois respectif à chaque station ouverte, mais aussi à l’ensemble du Val.
Dans ce dernier cas et en haute saison (juin-septembre), la circulation (ainsi que tout parcage) sera fermée entre le carrefour de la sortie d’Ifrane et la Zaouia.
L’accès sera alors strictement piétonnier, ou se fera par mini-bus (payant) depuis le centre d’Ifrane. Un projet de mini éco-train (tortillard à moteur) avait été éventualisé.
En basse saison (octobre-mai), les lieux de parcages seront redéfinis et strictement limités et encadrés. Il n’existe guère que 3 options car il est hors question de déboiser pour en créer. Le respect de la Nature et les loisirs de grand air vont de pair avec la promenade à pied et l’abandon de la voiture.
Le pique-nique sauvage est interdit et 3 ou 4 périmètres définis, spécialement aménagés et surveillés par gardes seront mis à disposition, avec aires de barbecues, tables, bans, cuves à ordure, etc.
Il convient de mettre un terme à l’aménagement erroné du site en parc de ville, avec bassins et sentiers bétonnés, etc., comme c’est le cas entre Ifrane et Vittel. Cette vision policée de la Nature engendrant des dysfonctionnements certains, elle est préjudiciable au maintien de la biodiversité. Le bruit excessif est interdit (affichage). Il faut limiter l’avancée urbanistique de plus en plus évidente en direction du Val. Des buildings dans un SIBE ?
Aucune espèce végétale ou animale allochtone ne doit faire l’objet de plantation ou d’introduction, hors celles dont la présence (critiquable) est un fait.
La fauche tardive doit être la règle (juin-juillet), afin de laisser les cycles des phytophages s’accomplir et ne pas massacrer « le peuple de l’Herbe ». Les grandes graminées et les mégaphorbiées sont autant de refuges électifs du plus grand intérêt pour la faunule.
Il a été toujours constaté un fauchage exécuté trop précocement (mai) par la Commune. Il entraîne un dénuement qui expose les sols à l’insolation et à la déshydratation, tout en tuant un nombre incommensurable de composants du microcosme, dont les Invertébrés fragiles. Merveilleux paradoxe quand on pense qu’un entomologiste – dont la démarche est celle d’un amoureux de la nature – doit se munir d’une autorisation (du type « permis d’observer » !) pour prélever quelques insectes adultes !
Il ne faut recourir à aucune utilisation de biocides chimiques d’aucun type sous prétexte de parasites aux dégâts imaginaires. Le seul « ravageur » de la naturalité est l’espèce humaine ! Des épandages inconsidérés, en amont, notamment contre la Processionnaire du Cèdre, ont chaque fois pollué la zone et les eaux de l’oued, appauvrissent localement la zoomasse et causant la mort de la faune aquatique.
Le respect de l’intégrité, tant des plantes basses (interdire les cueillettes – sauf en cas d’herborisation des botanistes – et lutter contre le piétinement intensif hors des sentiers) que des essences arborescentes (poursuivre les cas d’ébranchages), est irrévocable et une attention attentive des visiteurs est sollicitée par panneaux.
Á l’instar de tout acte de cruauté, la persécution des animaux, par bêtise, phobie ou amusement, est strictement interdite, poursuivie et annoncée comme telle par panneaux. C’est le cas du lance-pierre (hélas encore si courant), du dénichage, du massacre des Amphibiens et des Reptiles, etc.
Il faudrait sanctionner dorénavant l’abandon de détritus de toutes les sortes, y compris ceux organiques, les rejets solides et chimiques, mesure s’articulant avec la mise à disposition d’un réseau efficace et suffisant de poubelles, lesquelles seront vidées et désinfectées régulièrement.
Il est indispensable de prohiber l’exercice de sports collectifs, bruyants et dérangeants (du type football) et qui n’ont pas leur place dans un sanctuaire de la Nature. Il s’agit ici de faire la promotion des valeurs vertes du biopatrimoine et non pas des « vertus » brutales et tonitruantes du stade. Il en est de même pour les loisirs motorisés, moto tout-terrain, quad, etc.
Les promenades équestres pourraient être maintenues, mais avec discernement. Par leur multiplication, le piétinement des chevaux et la transformation de certaines clairières en écuries, le sol a été gravement endommagé. Un effectif de chevaux à ne pas dépasser sera défini, ainsi qu’un lieu de pacage aménagé, un parcours obligatoire et un nombre restreint de participant pour chaque randonnée. Une période d’essai est à tenter.
La pâture des ovins et des caprins doit être rigoureusement écartée, tout comme l’introduction frauduleuse des troupeaux avoisinant (tant pour l’abreuvage entre Vittel et le Refuge et depuis l’ouest, que dans la chênaie des hauteurs du Zerrouka; sans parler de tout le secteur aux confins de Termilat, totalement investi et odieusement ravagé par les bergers depuis bientôt 10 ans.
Les lessives des riverains – notamment des tapis par centaines à la sortie de l’hiver – doivent être une fois pour toutes interdites. Les eaux douces de tout le Maroc sont polluées par des détergents non dégradables (destruction de la flore et de la faune spécialisée), alors que les métropoles occidentales utilisent des lessives biodégradables pour les égouts citadins. Le lavage in situ des véhicules est interdit et réprimé. Tout comme les vidanges sur place.
La pêche, la chasse et le braconnage sont interdits. Seuls des prélèvements scientifiques et parcimonieux peuvent être autorisés.
Il faudrait aussi instituer une brigade mobile de « gardes écologiques » proposés par l’Association des Amis du Val d’Ifrane (et non « police »…) qui veillera aimablement et sans oppression à la conduite des promeneurs ; l’action en place des gardes municipaux, des élèments des F.A. et des gardes champêtres mandatés n’a jamais été à hauteur de la tâche car ces gens n’ont aucune formation, ni la moindre notion des règles rationnelles qui président au souci écologique. La demande du livret de famille d’un couple ne correspond pas plus à l’objectif visé que la vente d’écrevisses à pieds rouges.
Quant à la surveillance, il est nécessaire de nommer des gardes pour les aires de parcage et de pique-nique. Des éco-guides aux prestations rétribuées (dont modeste contribution des visiteurs) seront destinés à accompagner les visites internes aux pôles en réserves (sentiers-découvertes, observatoires, jardin botanique). Spécialement formés, ils seront affiliés au Centre d’accueil du type Maison de l’écologie.
Le ramassage des ordures, des poubelles sauvages (qui ne manqueront pas de perdurer vu les mauvaises habitudes ancrées) et des poubelles officielles sera effectué chaque fin de journée durant la saison et d’autres postes fixes ou temporaires seront à créer. Le recours à un PAG permettra enfin ; non seulement la sauvegarde du Val d’Ifrane, mais la création d’emplois fixes ou temporaires.
ABOU ZOUHEIR

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