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FIGUIG : L’espace de projets de Bouarfa-Tandrara

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L’espace de projets de Bouarfa-Tandrara

1. Présentation générale et caractéristiques démographiques

 

1.1. Pastoralisme et urbanisation

Sur le plan physique, l’espace de projets de Bouarfa-Tandrara représente le prolongement et l’élargissement vers le sud de la zone de Aïn Bni Mathar et de l’arrière-pays de Dabdou. Il s’agit de hauts plateaux dont l’altitude se maintient entre 1300 et 1500m en moyenne, avec des pointements correspondant à des rides taillées dans des matériaux durs, pouvant dépasser les 1900m (Jbel Lakhdar à l’ouest de Bouarfa).

Ces espaces plans où s’encaissent certains oueds à écoulement occasionnel, représentent le domaine de la steppe d’alfa et d’armoise, qui s’appauvrit au fur et à mesure que l’on avance vers le sud, pour faire place à des plantes épineuses, bien plus adaptées à l’aridité quasi absolue et aux grandes amplitudes thermiques causées par une continentalité exagérée. De très larges étendues sont complètement dépourvues de couvert végétal, ce qui les apparente beaucoup plus au désert qu’au monde des steppes.

Dans ces conditions particulièrement rigoureuses, l’agriculture devient pratiquement impossible, sauf là où des ressources en eau permettent de faire quelques cultures irriguées très sporadiques. L’élevage extensif du petit bétail et, parfois, des camelins représente la ressource quasi-exclusive des populations nomades. Dans ce monde de pastoralisme pur, seuls deux centres urbains, à savoir Tandrara et surtout Bouarfa, ont pu émerger, pour des raisons militaires et pour les besoins de l’exploitation minière. La réorganisation administrative ayant promu cet espace en province dès le milieu de la décennie 70, donna un coup de fouet fort important à l’accroissement de ces centres qui demeurent pourtant isolés dans les communes pastorales des Bni Guil, Tandrara et Maatarka.

1.2. Perspectives démographiques 

Actuellement, la population de cet espace se situe à près de 55.000 habitants, ce qui donne une densité moyenne ne dépassant guère 2 habitants au km², notion tout à fait abstraite dans ces contrées subdésertiques. Cet effectif se partage presque à égalité entre populations urbaines et populations pastorales.    

En fait, ces deux catégories de population ont connu des évolutions très différentes avec une quasi-stagnation des populations nomades, et une forte augmentation de la population urbaine, dont l’effectif a été multiplié par 3,3 entre 1971 et 1994. Cette évolution contrastée trouve son explication dans la sédentarisation de plus en plus accélérée des nomades, mouvement qui draine l’équivalent du croît démographique, et dans le fait que Bouarfa a attiré des populations  venant d’ailleurs, parfois de très loin, suite surtout à sa promotion en chef-lieu de province (administration, services techniques, armée…).

Évolution récente de la population

 
Milieu    1971    1982    1994      
Rural    24.395    22.073    23.322      
Urbain    7.755    18.039    25.272      
Total    32.150    40.112    48.594     
Source : RGPH

Le sursaut démographique enregistré dans les centres urbains, relevé à partir du milieu de la décennie 70, vient en réponse au souffle nouveau amené par le facteur de promotion administrative, au moment où l’économie traditionnelle avait atteint ses limites et l’exploitation minière s’est essoufflée. Cela témoigne éloquemment de l’incidence de l’intervention publique dans la dynamisation des espaces périphériques. Ceci est plus vrai encore dans le cas de l’espace de projets de Bouarfa-Tandrara dont les ressources de développement sont fort réduites et que sa localisation géographique frontalière met dans une situation d’espace fermé donnant sur une frontière aveugle et des contrées sahariennes très pauvres.

Cela signifie que pour l’avenir, l’action volontaire de développement est absolument incontournable pour maintenir là un certain dynamisme, tout à fait vital pour l’ensemble de cet espace géopolitiquement important. La promotion administrative doit être soutenue par une action de promotion économique, afin de consolider la base sociale de ces contrées lointaines. C’est sur ces bases que les perspectives démographiques sont envisagées.

Perspectives démographiques

 
Milieu    2000    2005    2010    2015    2020    2025      
Bouarfa    23.500    28.000    33.000    37.500    43.500    48.000      
Tandrara    6.500    8.000    10.500    12.500    14.000    16.000      
Centres pastoraux *    –    1.000    1.500    3.000    4.500    6.000      
Urbain    30.000    37.000    45.000    53.000    62.000    70.000      
Rural    25.000    23.000    20.000    18.000    16.000    15.000      
TOTAL    55.000    60.000    65.000    71.000    78.000    85.000      
Taux d’urbanisation (%)    55    62    69    75    79    82     
* Maatarka, Mangoub et Tradid  essentiellement.        Source : Elaboration Edesa

Ces projections démographiques qui prévoient une augmentation de plus de moitié de l’effectif de population, suppose un effort important et continu pour relayer celui qui a été fourni antérieurement, afin de maintenir et de créer un environnement propice à la relance de l’économie pastorale et de doter les centres urbains d’activités nouvelles et d’équipements sociaux convenables, pour y fournir l’emploi nécessaire et réunir les conditions d’encouragement des investisseurs, notamment dans les villes qui devront abriter plus des 4/5 de la population totale.

Dans cet espace de projets, la politique de développement devra agir à deux niveaux certes différents, mais intimement complémentaires, réservant des projets spécifiques pour le monde urbain et des actions de soutien et d’encadrement pour l’activité pastorale.

Par ailleurs, le développement de l’espace de projets de Bouarfa-Tandrara pose des problèmes de type particulier, compte tenu de son éloignement par rapport aux grands pôles d’approvisionnement, d’un côté, et de la rareté prononcée et structurelle de l’élément vital qui est, en l’occurrence, l’eau, de l’autre. Cela signifie que l’effort de développement et d’aménagement de ces espaces génère automatiquement des surcoûts par rapport à des régions moins excentriques et pourvues de ressources propres dont ne bénéficient pas ces hauts plateaux steppiques et subdésertiques.

Ceci étant, les facteurs d’ordre géostratégique et la nécessité de lutter contre l’avancée du désert, d’une part, et les impératifs de solidarité nationale à l’égard des régions peu favorisées du pays, d’autre part, justifient amplement toute action de soutien en faveur de cette zone qui occupe une position avancée du territoire national.

2. Développement des villes et consolidation de l’économie urbaine

Les villes de cet espace, qui constituent des points sélectifs de concentration de la population, nécessitent des actions rigoureuses de nature à consolider cette concentration et à conforter ces agglomérations urbaines dans leurs fonctions de centres d’encadrement des espaces alentour.

2.1. L’approvisionnement suffisant en eau

Pour que l’approvisionnement en eau ne s’érige pas en facteur limitant de la croissance et du développement des villes, il faudra assurer un volume d’eau de l’ordre de 2,5 millions de m3/an vers 2020-2025, en passant par près de 1,6 million de m3/an en 2010. Les trois quarts de ces besoins seront formulés par la ville de Bouarfa, ceci sur la base d’une dotation quotidienne constante de 100 litres par habitant. Il faudra assurer, évidemment, un volume d’eau de 50% plus important, si cette dotation augmente de moitié au cours des deux décennies à venir, suite à l’installation d’activités économiques ou touristiques fortes consommatrices d’eau.

Besoins en AEPI pour les villes
(milliers de m3 )

 
Villes    2000    2005    2010    2015    2020    2025      
Tandrara    240    295    385    460    510    585      
Bouarfa    860    1.020    1.200    1.400    1.600    1.800      
Total    1.100    1.315    1.585    1.860    2.110    2.385     
Source : Élaboration Edesa

Il faut noter que toutes les ressources en eau susceptibles d’être mobilisées à cette fin sont d’origine souterraine, pour la plupart fossiles et, donc, non ou très peu renouvelables, étant donné la forte aridité du climat (à peine 100 mm de pluie par an en moyenne et de façon très occasionnelle). Deux importantes nappes peuvent être sollicitées à ce niveau, à savoir celle de Chott Tigri au nord-est et celle de Tamlalt à l’ouest de Bouarfa. Les forages actuels opérés dans la première satisfont quelques besoins en AEP pour les éleveurs, alors que ceux qui ont été effectués dans la seconde alimentent la ville de Bouarfa avec un débit total de 40 l/s.

Notons, dans ce sens, qu’un projet est programmé pour le centre de Bouarfa. Il consiste à opérer :

la réalisation et l’équipement d’un forage pour un débit de 5 l/s,
la réhabilitation des réservoirs,
l’entretien et l’amélioration du réseau de distribution.

De même, l’alimentation du centre de Tandrara est envisagée à travers une action programmée qui comprend, entre autres :

·    l’extension du réseau de distribution,
·    la mise en place des canaux d’adduction,
·    la construction de 3 stations de pompage et d’une station de traitement,
·    la réalisation de 1570 branchements individuels.

La recherche des sources d’approvisionnement complémentaires doit être poursuivie et l’adduction d’eau potable programmée pour faire face aux besoins futurs, non seulement de Bouarfa et de Tandrara, mais également des petits centres qui sont en train d’émerger, çà et là à travers la steppe.

2.2. L’assainissement indispensable

Ici, la question de l’assainissement est doublement importante, dans la mesure où elle permettra, d’une part, de protéger les eaux souterraines si précieuses dans le cas d’espèce et, d’autre part, de récupérer un volume d’eau réutilisable, après traitement, dans la constitution et l’entretien d’espaces verts et dans les activités de production artisanale, voire de petite industrie.

La solution du lagunage des eaux usées paraît  inappropriée, compte tenu des très fortes chaleurs ambiantes et des risques de pollution des nappes, d’où la nécessité d’installer un système intégré de collecte et de traitement des eaux usées à Bouarfa notamment, vu le volume des eaux usées qui sera de plus en plus produit par la ville, dont la population sera de l’ordre de 50.000 personnes vers 2025.

Des systèmes d’assainissement appropriés doivent être étudiés pour Tandrara certes, mais aussi pour les petits centres émergents de cet espace, notamment Maatarka, Mangoub, Tradid et Balghiadia.

2.3. La confortation de l’économie urbaine

Les infrastructures économiques actuelles restent fort modestes et ne peuvent constituer une base solide pour le développement économique et socio-culturel souhaité pour les prochaines décennies.

En effet, les fonctions économiques de Bouarfa se limitent à l’activité du souk de bétail qui joue aussi le rôle de point de ravitaillement de la population urbaine en produits de première nécessité. Aux équipements administratifs et socio-collectifs indispensables, s’ajoute la fonction de garnison militaire. Les deux premières fonctions, commerciale et administrative, se retrouvent, à un moindre niveau, dans le centre de Tandrara. Autrement dit, les deux centres se contentent actuellement d’activités tertiaires relatives à l’encadrement administratif, à la prestation de services de base et à l’approvisionnement en produits de première nécessité.

Le développement et l’aménagement futurs nécessitent sans doute la consolidation et la diversification de ces fonctions tertiaires, mais aussi l’implantation d’activités de production susceptibles de créer de l’emploi, de dégager une plus-value, de générer des flux d’échange, d’améliorer les revenus et de conférer une certaine base économique propre à la zone, de nature à en diminuer la dépendance et à réduire les coûts des produits et services importés d’ailleurs.

Le projet d’auto-développement que les centres de Bouarfa et de Tandrara sont appelés à rechercher, pourra être réalisé par l’exploration d’un certain nombre de créneaux, notamment dans le secteur artisanal et le montage de petites entreprises industrielles. Les domaines qui semblent les plus accessibles à investir sont, avant tout, le développement de l’artisanat et de la petite industrie.

2.3.1. Le développement de l’activité artisanale

L’appui à l’économie urbaine repose en bonne partie sur la gamme des métiers artisanaux, tout aussi bien traditionnels que modernes.

Le secteur du bâtiment, aussi bien au niveau de la production qu’à celui des services, est un champ tout à fait privilégié, par la gamme des métiers qu’il requiert : maçonnerie, menuiserie, ferronnerie, travaux de mosaïque, de plâtre, plomberie, électricité, etc. Le mouvement de construction en perspective, pour une capitale provinciale de près de 50.000 habitants en 2025, pourra générer non seulement la croissance de l’ensemble de ces branches artisanales, mais également celles concernant l’équipement des logements, ainsi que les métiers de réparation de cet équipement.

Parallèlement, plusieurs autres branches liées au textile et à l’artisanat d’art sont à encourager : bijouterie, tapisserie et tissage (abondance de la laine) ; poterie ; vannerie (alfa).

Le développement d’un tel artisanat peut trouver un appui important dans le fait qu’une bonne partie de l’élite administrative de Bouarfa notamment provient de villes lointaines et préfère recréer, sur place, une ambiance urbaine au niveau du logement, comportement qui se retrouve évidemment aussi chez l’élite locale.

Dans cette perspective, il est tout indiqué d’aménager une zone d’activité à Bouarfa et une autre à Tandrara, pour accueillir les métiers artisanaux qui nécessitent de l’espace et un équipement adéquat.

2.3.2. La promotion de la petite industrie

Plusieurs créneaux peuvent s’avérer intéressant à développer à Tandrara, mais surtout à Bouarfa. On soulignera notamment les suivants :

–    la production de matériaux de construction, avec surtout la création d’une briqueterie qui pourrait travailler également pour les villes de Figuig et celles du Haut Atlas Oriental, voire même rayonner vers le Tafilalet et la haute Moulouya. L’amélioration du réseau routier est un facteur favorable pour l’écoulement du produit ;

–    le travail du cuir, avec l’aménagement d’une petite tannerie, vu l’importance de l’élevage ;

–    le travail du marbre qui peut bénéficier de l’existence d’un gisement intéressant près de l’oasis de Ich,

–    une minoterie qui, en plus de la production de farines et de dérivés pour la consommation locale et sous-régionale, peut dégager des quantités appréciables de son pour l’alimentation du bétail, à titre de complémentation, en vue d’alléger quelque peu la pression sur les parcours.

Dans ce même contexte s’insère également la possibilité d’installation d’une unité de production d’aliments du bétail, dont le champ de rayonnement pourrait s’étendre à une bonne partie de la zone des steppes.

Une autre opportunité pourra être représentée par l’installation d’une fabrique de confection de tenues militaires, qui disposerait d’un large marché constitué par les nombreuses garnisons de la Région de l’Oriental.

Dans le même souci, il faudra appuyer l’unité  d’emplissage de bouteilles de gaz, actuellement en fonction, par  des initiatives similaires ou complémentaires.

Dans le but de mener ces actions et bien d’autres dans les différents secteurs, des mesures s’imposent pour encourager l’investissement dans cet espace de projets :

–    adaptation de l’assiette des impôts aux données locales par la réduction de la pression fiscale ;
–    annulation du droit des 5% sur la taxe urbaine que la province doit verser à la Caisse Régionale, étant donné la situation de pauvreté dans laquelle se trouve la province par rapport aux autres provinces de la Région ;
–    exonération de l’impôt à hauteur de 50 % relatif à l’IGR et l’IS, afin d’encourager les investisseurs à s’implanter dans la Région ;
–    encouragement de l’implantation d’activités de transformation par le biais d’infrastructures et l’équipement de zones d’activités polyvalentes.

2.4. L’urbanisme et l’habitat

Par plusieurs côtés, Bouarfa ne pose pas de grands problèmes d’aménagement urbain, parce que la ville n’a pas connu d’entraves foncières et s’est donc développée de manière assez harmonieuse.

Mais, justement cette « liberté foncière » a entraîné un étalement exagéré de la ville et donc une dispersion qui, à plusieurs égards, peut nuire au bon fonctionnement d’une agglomération qui devra abriter près de 50.000 âmes dans 20 à 25 ans et, ainsi, pratiquement doubler d’étendue.

La logique de gestion dicterait de procéder à un effort urgent, continu et méthodique ayant pour objectif de ramasser le tissu urbain dans le but de :

–    regrouper la ville autour d’un centre de services qui lui donnerait une certaine âme,
–    structurer la ville autour de certains équipements symboliques et/ou fonctionnels,
–    éviter l’extension démesurée des réseaux d’infrastructure, en matière d’adduction d’eau, d’électricité, de téléphone, d’ assainissement, de voirie, de ramassage des ordures, de distribution du courrier, etc.
–    réduire ainsi les coûts de l’urbanisation,
–    améliorer la gestion en rationalisant l’utilisation des ressources humaines et du matériel.

L’élaboration d’un Plan d’aménagement sur ces bases s’impose pour Bouarfa.

Par ailleurs, Tandrara a besoin d’un schéma de restructuration et d’aménagement susceptible de préparer l’assiette spatiale à un développement socio-économique équilibré. Des quartiers entiers de la petite ville nécessitent des travaux de réhabilitation importants. L’organisation du « centre-ville » devra être opérée indépendamment de la route nationale qui le traverse et le coupe en deux parties. Là aussi, il est indispensable de lutter contre l’étalement inconsidéré du tissu urbain, sachant que l’agglomération aura entre 15000 et 20000 âmes vers 2025-2030.

Enfin, les centres émergents de Maatarka, Mangoub, Balghiada, Tradid ont besoin, dès aujourd’hui, de disposer de documents d’aménagement et de développement pour en orienter et encourager la croissance, sachant que leur rôle est primordial dans l’encadrement des pasteurs et la prestation des services qu’ils requièrent, tout en étant capables de fixer les nomades en cours de sédentarisation.

2.5. Les infrastructures et les équipements

 

2.5.1. Le réseau routier

Il est nécessaire d’aménager les liaisons routières concernant cet espace de projets pour faciliter le transport et la communication avec les autres parties de la Région ainsi qu’avec les régions contiguës. A cet effet, les actions suivantes sont à entreprendre :

–    élargissement à 10 m de la RN n°10 et son amélioration entre Bouarfa et Arrachidia,
–    élargissement à 7 m et renforcement de la RN n°17 reliant Bouarfa à Figuig,
–    construction de la route régionale 604 reliant Tandrara à Talsint,
–    Aménagement de la liaison entre Balghiadia et Bouarfa sur une longueur de 70km.

2.5.2. Les équipements socio-culturels

–    extension de l’hôpital provincial de Bouarfa;
–    construction d’un lycée avec internat à Tandrara pour desservir les élèves provenant des communes de Tandrara et de Maatarka;
–    centre de formation professionnelle à Tandrara;
–    centre de santé à Tandrara ;
–    mise en place d’unités mobiles de santé pour les populations rurales ;
–    création d’un musée à Bouarfa,
–    construction d’un lycée agricole spécialisé surtout en élevage à Tandrara ;
–    création d’une unité pour la recherche sur les problèmes de désertification à Bouarfa.

3. L’économie pastorale

3.1. La modernisation de l’élevage

Les parcours constituent évidemment le soubassement de l’économie pastorale locale. Or, ceux-ci se trouvent menacés à la fois par l’aridité du climat et par l’augmentation du troupeau. Les effets conjugués de ces deux facteurs physique et anthropique soumettent la steppe à rude épreuve, d’autant plus que les pasteurs ont augmenté leur mobilité ( camions) et leurs rayons d’actions à travers l’ensemble des hauts plateaux.

Ainsi, le projet FIDA, visant l’amélioration des parcours et l’encadrement des pasteurs nécessite d’être reconduit, moyennant une évaluation de ses apports et les correctifs qui doivent y être apportés, pour une meilleure adaptation et une plus grande efficacité. Ces correctifs sont à réajuster principalement du côté de la participation et la mobilisation des populations concernées, afin d’obtenir leur adhésion totale à l’objectif et aux méthodes de protection de la steppe et de promotion de l’économie pastorale sur des bases durables.

La création de villages pastoraux s’impose ici pour assurer les services nécessaires aux éleveurs et leurs troupeaux, en premier lieu l’aménagement de points d’eau, l’organisation des services vétérinaires, l’approvisionnement en aliments de complémentation et les services socio-éducatifs de base.

Les localités de Maatarka, Tradid, Balghiadia et Mangoub, devraient bénéficier de tels équipements, à la fois pour leur propre développement et pour l’encadrement et la prestation des services aux éleveurs.

3.2. Le développement de l’activité agricole

Dans les zones où des possibilités d’eaux souterraines relativement suffisantes existent, il est possible de diversifier l’économie des steppes par le développement de petites aires irriguées pour la production de céréales, mais surtout de maraîchage et de cultures fourragères. De telles opportunités s’offrent essentiellement dans le Chott Tigri, la plaine de Tamlalt et la zone de Mangoub. Cette dernière est actuellement le théâtre d’une mise en valeur agricole assez remarquée avec la naissance d’un petit périmètre irrigué au moyen de pompage. Il s’avère nécessaire d’en aménager d’autres sites par :

–    la réalisation de barrages collinaires sur des sites appropriés ;

–    l’aménagement de la nappe de Lahouita près de Tandrara. Cette nappe souffre de l’abondance de nitrate et du faible volume d’eau ;

–    la prospection dans la plaine de Tamlalt.

Le cas particulier de l’oasis enclavée d’Ich, en situation de poste frontalier, requiert une attention particulière pour sauvegarder l’oasis et permettre sa pérennité, sachant qu’il s’agit d’un repère spatial fondamental sur la frontière. A cet égard, la route qui la relie à Bouarfa a besoin d’être améliorée pour en faciliter l’accessibilité.

Qu’il s’agisse de développement pastoral ou d’actions et mesures en faveur de l’agriculture, il est nécessaire d’appuyer et d’étendre les programmes de lutte contre l’avancée du désert par les techniques qui ont déjà fait leurs preuves ailleurs, tout en les adaptant aux conditions locales.

3.3. Les promesses du tourisme

Il est bien évident que les actions proposées plus haut ne sont pas limitatives. Bien d’autres peuvent être identifiées en faveur de cet espace de projets. C’est le cas du secteur touristique qui offre certaines opportunités, notamment des formules de safari à travers les grands espaces de la steppe, avec les possibilités de chasse et de dépaysement. Cette activité, limitée certes, devra bien bénéficier d’une organisation appropriée avec la participation des pasteurs qui pourront procurer des structures d’accueil originales aux touristes (hébergement sous la tente, restauration, produits d’artisanat…).

Cette forme de tourisme nécessite, bien entendu, le développement du gibier par l’introduction d’espèces adaptés, tout en veillant à leur protection et à celle de l’environnement.

Une autre forme de tourisme peut être développée également, si on arrive à lancer l’axe touristique saharien, longeant le sud de l’Atlas, depuis le Draa jusqu’au Touat,  en passant par le Tafilalt et Figuig ; ce qui nécessite bien sûr une coopération maroco-algérienne fructueuse pouvant surmonter la situation de tension factice actuelle.

Cette activité touristique devra constituer des opportunités de création d’emplois, mais également des sources de revenus directs et indirects, pour les pasteurs et pour les populations des centres urbains, à travers le développement de produits et sous-produits de l’élevage (laitages, travail des peaux, de la laine, du poil…).

De même que la relance de l’élevage camelin, la consommation de produits artisanaux ainsi que la collecte de produits naturels comme les truffes noires des steppes, les plantes aromatiques et médicinales, peuvent contribuer également à améliorer les revenus des ménages.

3.4. Les infrastructures de désenclavement

Le désenclavement de la steppe est tributaire de l’aménagement des voies de communication, notamment pour relier la nationale 17 à la moyenne et haute vallée de la Moulouya. A cet égard, le programme routier comprend plusieurs aménagements qu’il s’agit de consolider, ultérieurement, au fur et à mesure du développement des centres émergents, et des transformations que connaîtra l’activité pastorale. Les projets identifiés se présentent comme suit:

–    aménagement de 48 km de la RP 6104, entre Bouarfa et Balghiadia ;
–    renforcement de 73 km de la RP 6108, entre Bouarfa et Ich (le projet est financé par le Fonds Spécial Routier) ;
–    extension et renforcement d’un tronçon de 39 km de la RN 10, reliant Bouarfa et Arrachidia, pour améliorer le niveau de service et de sécurité routière ;
–    construction de 49 km de la RP 6100, reliant Tandrara et Maatarka dont le but est le désenclavement de la population et le développement local ;
–    extension et revêtement de la troisième tranche de la Nationale 17, se localisant à Bouarfa (22 km) ;
–    construction de la route provinciale N6100, devant relier Borj Bal Frissate à Maatarka.

3.5. L’exploitation minière

Cet espace de projets est riche en minerais : manganèse, cuivre, plomb, zinc, fer, barytine, or, antimoine …

L’activité minière se déroule dans deux cadres :

–    une recherche et une exploitation minière de type capitaliste par des sociétés, des personnes physiques ou des organismes de l’Etat comme le BRPM, selon la loi réglementant cette activité promulguée en avril 1959,
–    une activité artisanale, encadrée par la CADETAF, créée en décembre 1960.

La promotion du secteur des mines nécessite :

–    la réalisation de cartes géologiques et minières couvrant l’ensemble de l’espace,
–    la restructuration du secteur de la production artisanale, avec incitation à l’exploitation minière par le secteur privé,
–    l’encouragement de la recherche minière, notamment pour les métaux précieux (or et argent),
–    la valorisation de la production locale, notamment par la restructuration de la CADETAF dans le sens d’assurer des revenus équitables aux mineurs-artisans..

Conclusion

L’espace de projets de Bouarfa-Tandrara appelle le redoublement des efforts jusque-là déployés, afin d’en assurer le développement futur. Il s’agit là d’une œuvre commandée par les nécessités de la solidarité nationale et la péréquation territoriale. Cela est indubitablement du ressort de l’Etat, de la Région et de la Société Civile, en raison du caractère particulier de ces espaces éloignés. Mais c’est justement cet éloignement qui devrait y représenter le levier essentiel de l’investissement public, afin de préparer le terrain et d’inciter l’initiative privée à participer à l’œuvre qui devra être accomplie en faveur de ce territoire dont la dimension géo-stratégique est indéniable, en vue de l’intégrer au mieux dans le giron national et mettre en place les moyens appropriés pour lutter contre l’avancée du désert..

C’est dans cette perspective qu’il est nécessaire d’encourager et d’appuyer l’action diversifiée et pluri-sectorielle qu’accomplissent les nombreuses associations existantes, mais dont les moyens demeurent fort limitées. Cet appui devra se faire au moyen de cycles de formation, de journées d’études, en leur faisant profiter du meilleur encadrement de la part d’experts en matière de développement local. L’esprit associatif constitue le meilleur ingrédient à la mobilisation et à la rationalisation de l’ensemble des ressources locales.

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