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Chronique d’un remaniement ministériel et lecture critique du Projet de Loi de Finances 2020 :défis et enjeux dans le gouvernement El Othmani II

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KHLIFA Boumediene / OUJDACITY.NET

Après des semaines de tractations, de tergiversations,de spéculations,le gouvernement remanié a finalement vu le jour , deux ans et demi après le constitution d’un premier gouvernement. En effet ,il a été reçu dans sa nouvelle mouture par le roi Mohammed 6 dans la salle du Trône du Palais Royal de Rabat le 9 octobre 2019. Le nombre des ministres est largement réduit par rapport à la première formation gouvernementale .Il est passé d’une quarantaine à 23 membres .La grande différence est la suppression des secrétaires d’Etat dans la seconde formation.Ce qui est apparemment une bonne chose pour l’allègement budgétaire et pour une meilleure efficacité dans la gestion du pays sauf que nos honorables ministres sortants ,la plupart d’entre eux étaient des secrétaires d’Etat ont bénéficié chacun d’une indemnité de départ de près de 600 000 dhs ,et 500 000 dhs pour les secrétaires d’Etatp ; en tout et pour tous elle s’élève à 5 millions de dhs ,plus près de 40000 dhs de pension de retraite mensuelle pour les ministres et 30000 dhs pour les secrétaires d’Etat.Cette pension mensuelle coûtera à l’Etat annuellement près de 8,75 millions de dhs à l’Etat . Ces coûts alimentent le débat dans l’opinion publique qui estime que c’en est trop.(Des chiffres mentionnées selon le journal électronique Médias24)Des voix s’élèvent de plus en plus pour que cela cesse car en définitive c’est le contribuable qui en subit le poids de cette générosité excessive.

Monsieur El Othmani et son équipe vont devoir serrer les coudes et travailler la main dans la main pour mener à bien le navire gouvernemental à bon port.Certes ,la tâche n’est pas facile. Déjà,dès le début le Projet de loi de Finances 2020 a fait et continue de faire l’objet de vives critiques de la part de l’opposition parlementaire et des acteurs professionnels dans les domaines concernés notamment pour l’article 9 du projet ,qui interdit la saisie de biens d’Etat suite à un litige judiciaire .Le débat était houleux au sein des députés .Il y a de bonnes choses mais il yen a aussi de mauvaises dans ce projet .Les bonnes choses :les prix de première nécessité resteront inchangés (le sucre,la farine,le gaz),le salaire moyen dans la fonction publique sera de 8000dhs(une revalorisation de 6% par rapport à 2018 il y aura plus d’investissements publics ;pour les musulmans pieux ,il y aura une augmentation de l’impôt sur la bière et le vin ,que cette nouvelle n’en déplaise aux consommateurs d’alcool. 91milliards de dhs alloués à l’enseignement et à la santé avec une création de 20000 postes répartis entre ces deux secteurs publics .Pour les mauvaises choses :il y aura moins d’emplois avec une baisse de 8,4% ;plus de dépenses publiques ;les caisses de l’Etat se vident d’où la nécessité de les renflouer en rapatriant l’argent placé à l’étranger d’où le recours à une seconde amnistie après celle de 2014 ce qui se traduit en arabe par=(Aafa allah aamma salaf ). Cette amnistie continue elle aussi des’attirer les foudres de l’opposition la considérant comme contraire à la constitution.. Les petits commerçants devront passer à la caisse.La défense nationale quant à elle s’est arrachée sa part du lion avec un budget de 45 milliards de dhs !Voilà brièvement quelques bribes d’information sur le Projet de loi de Finances 2020.

Mon intention est ailleurs.Il faut d’abord savoir qu’un grand défi attend cette nouvelle formation gouvernementale.Les ministres devront faire face à plusieurs défis.Ils devront s’attaquer à plusieurs fronts.Outre l’urgence de répondre aux injonctions du discours royal prononcé lors de la rentrée parlementaire du 11 octobre 2019.Je cite une phrase clé de son discours« cette année législative doit être marquée du sceau de la responsabilité et du sérieux » ;le roi a également lié banques et développement dans le contexte du financement des petites et moyennes entreprises(PME) faisant allusion aux jeunes diplômés .Le discours royal était très clair en vue d’impulser une dynamique

de développement , de collaboration et de coopération entre les organismes financiers en premier les banques et les jeunes diplômés dotés de projets de développement et d’entrepreneuriat.

Le discours royal a mis en garde le gouvernement contre tout échec dans la gestion du pays.Il est vrai que le chemin est semé d’embûches et que la facture sociale est très lourde.Mais je voudrais revenir au Projet de loi de Finances 2020.A ma connaissance,le ministre des Finances n’a pas fait mention de millions de chômeurs qui n’ont ni diplômes ni un niveau d’instructions élevé et qui vivent la plupart du temps dans la précarité et le besoin les plus absolus . Certes, dans cette catégorie de jeunes, les plus courageux ne baissent pas les bras .Ils font de petits métiers au coin d’une rue ou pratiquent même de la contrebande,les plus désespérés se livrent à l’émigration clandestine à la recherche d’un Eldorado.Ce sont des hommes et des femmes. Les femmes en manque de moyens ,se trouvant dans le besoin sans aides sociales ni travail se livrent à la prostitution pour survivre. C’est la face cachée du monde de travail ,du travail au noir, du travail illégal.C’est ce que les économistes appellent l’économie parallèle ou l’économie souterraine ou encore l’économie clandestine qui fait plus de mal que de bien à l’Etat .En effet,elle échappe aux règles économiques et sociales et à l’intervention de l’Etat autrement dit au prélèvement fiscal obligatoire par exemple.Cette économie souterraine par l’argent qu’elle génère peut même déboucher sur des activités criminelles ou délitctuelles et leur recel.Etrangement,ni le ministre des finances ,ni nos honorables députés ni même le chef du gouvernement n’ont abordé la question de cette catégorie de citoyens qui sont légion,ils sont des milliers voire des millions à travers le pays.Même dans le discours royal ,il n’est pas fait mention de ces larges franges de jeunes sans ressource aucune et en chômage permanent et qui vivent le calvaire ,des situations de besoin absolu.Nos honorables membres du gouvernement ont choisi dès le départ dans le débat du Projet de loi de Finances 2020 d’adopter le politiquement correct et de ne pas sortir du cadre général habituel.Je ne prends pas la défense de ces milliers ou de ces millions de chômeurs.Mais si l’on s’en tient à l’opinion de la rue ,la majorité écrasante des citoyens ressentent le ras-le- bol général.Ils se plaingnent du malaise social généralisé ,de la baisse du niveau de vie ,de la faiblesse du pouvoir d’achat,de l’absence d’aides sociales pour les démunis ,de la précarité de larges franges de la population, de l’aggravation de la corruption et du clientélisme dans la société.

Qu’est ce que je proposerais au chef du gouvernement , au ministre des droits de l’homme et à la ministre de solidarité si par hasard je les rencontrais ? Eh bien ,je leur suggérerais de consacrer ces deux années restantes à leurs mandats de ministres de se pencher sur un RSA à la marocaine .Je leur dirais de faire pour les jeunes marocains ce que la France fait pour ses jeunes français .C’est quoi le RSA ?Le RSA est le revenu de solidarité active est un dispositif visant à assurer aux personnes sans ressources un niveau minimum de revenus ainsi qu’un programme d’accompagnement à l’insertion professionnelle.Ce revenu est distribué aux jeunes entre 18 et 25 ans.Depuis quelques années,désormais le RSA s’est élargi et est distribué à tout jeune sans revenu ni ressource même au-delà de 25 ans ;il s’appelle le RSA-socle ,il assure un revenu minimum et généralement il constitue le complément d’un petit salaire.Ce montant est versé par la CAF (la caisse d’allocation familiale) c’est l’équivalent de la CNSS chez nous au Maroc.Pour être clair,le RSA est versé aux personnes sans emploi et aux travailleurs qui disposent de faibles ressources .La France l’a appliqué il y a 50 ou 60 ans avec des modes d’aides évolutifs selon les politiques adoptées par des gouvernements successifs ,pourquoi pas le Maroc. Les Marocains se rappellent le système d’aides institué par le gouvernement Benkirane il y a quelques années.Il s’agissait de distribuer aux veuves une aide mensuelle de quelques centaines de dirhams allant jusqu’à 800 dhs.Des partis dans l’opposition parlementaire étaient contre cette initiative car elle arrangeait ,selon eux,plus l’électorat du PJD que le reste de la population, autrement dit cette politique d’aides est adoptée surtout à des fins électoralistes,ce qui est vraisemblable voire sûr surtout que le gouvernement Benkirane était constitué en grande partie de ministres PJDistes qui appuyaient fortement cette initiative tant que cette catégorie de population leur rapportait des voix aux élections !

D’autres formes d’aides peuvent être citées et qui sont entrées dans le système de solidarité sociale en France depuis une trentaine d’années tel le RMI(le revenu minimum d’insertion remplacé par le RSA),la prime d’activité ,l’aide au logement etc…Pourquoi le Maroc ne devrait –il pas s’inspirer de l’exemple français quand il s’agit de subvenir aux besoins des plus démunis ?telle est la question qu’on pourrait poser aux ministres concernés notamment et surtout à l’honorable ministre de la Solidarité,du développement social de l’Egalité et de la Famille Madame Jamila Moussali et au ministre de l’emploi Mr Mohamed Amakraz.ainsi qu’ au ministre des droits de l’homme ,parce que c’est de cela qu’ il s agit ,des droits humains chers messieurs !

Revenons au smig(le salaire minimum garanti).Là aussi on est surpris que le PLF(2020) n’ait pas entamé la question du smig qui s’élève aux alentours de 2300 dhs.Une misère par rapport au coût de la vie !Encore que dans le privé ,ce smig n’est pas respecté dans la plupart des cas.Certains touchent, contrairement à la législation, à peine la moitié du smig ou même pas la moitié. Etrangement ,ni les syndicats ni les partis représentés dans les deux chambres n’ont interpellé le gouvernement sur la question du smig.

Pour finir,voilà quelques réflexions et interrogations concernant la formation du nouveau gouvernement El-Othmani II et le projet de loi de Finance 2020.Je ne prétends pas avoir dévoilé les tenants et les aboutissants de ce débat mais cela ne signifie pas pour autant que les défis et les enjeux de la politique gouvernementale sont faciles à relever. Personne ne peut nier que Le malaise social est ressenti par la majorité des Marocains.Le chômage ,la précarité,les inégalités et injustices sociales ,la corruption et le clientélisme dans les partis politiques et l’administration pourraient allumer la mèche d’une contestation populaire d’une grande envergure si l’on ne prenait pas cela au sérieux pour combattre au maximum ces fléaux sociaux à commencer par l’impunité des hauts responsables politiques . Rappelons que les ministres malheureux impliqués dans la crise du Rif étaient limogés mais pas sanctionnés et traduits en justice.On voit quotidiennement à travers les médias et réseaux sociaux ce qui se passe au Liban ,en Irak,en Egypte dans certains pays d’ Amérique latine comme le Chili,la Bolivie,l’Argentine,la Colombie,.le Vénézuéla et tout près de nous l’Algérie où les peuples se mobilisent parce qu’ils en ont marre de leurs gouvernements et des partis politiques qui se complaisent au bon vouloir de ces gouvernements qui tournent souvent le dos aux peuples.Le roi ne cessaient depuis longtemps de donner à travers ses discours des signaux forts aux responsables politiques et aux acteurs de l’administration pour mener à bien les réformes des politiques gouvernementales sur la base des articles de la nouvelle constitution. Enfin, mes vœux les plus sincères , c’est de voir ce nouveau gouvernement réussir à relever tous les défis et enjeux qu’il s’est fixé pour le restant de son mandat.

 

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