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Qui peut arrêter le boycott ?

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Le peuple marocain a trop longtemps hiberné avant de se réveiller pour prendre conscience que le droit ne se donne pas, qu’il s’arrache, lambeau par lambeau, goutte de sang et de sueur par goutte de sueur et de sang, jusqu’au dernier souffle. Le peuple est tout d’abord sorti, impulsif et débordant d’une énergie nouvelle, animé par une volonté farouche de reprendre ses droits dont on l’avait spolié, qu’on lui avait ravis, manifester par les rues et sur les places publiques pour demander la chute de la corruption qui se concrétise sous ses formes les plus viles et les plus veules et des corrompus à visages d’hommes qui infestent les administrations du pays. La corruption n’est pas une idée confuse, abstraite, flottante, elle est au contraire une ligne droite, verticale, qui va de l’arrondissement du quartier au parlement et aux différents ministères. Les corrompus ne sont pas des êtres inconnus, anonymes, cagoulés, ils sont au contraire des êtres à visage d’hommes qui s’échelonnent du fonctionnaire le plus insignifiant au responsable le plus influent. Si la corruption est un mal, un vice, une gangrène, les corrompus sont des êtres sans âme humaine. Seulement, les manifestations des rues se terminaient le plus souvent à l’avantage de la corruption et des corrompus qui tenaient et tiennent encore en main, hélas ! le pouvoir de les réprimer dans le sang, envoyant les têtes dures des manifestants en prison, tabassant les suiveurs à coups de matraque, meurtrissant les derrières des brailleurs à coups de brodequins, intimidant les sympathisants en leur faisant croire qu’ils appellent à la ‘’fitna’’, au désordre, à l’anarchie, au chaos. Mots terribles dont était étiqueté tout manifestant sorti crier contre l’injustice, le mépris, la pauvreté, en un mot contre ‘’la hogra’’ pour demander à vivre dans la dignité humaine, une dignité bafouée, souillée. Le peuple est épuisé, anéanti. Il n’en peut plus d’être réduit à vivre au jour le jour sans savoir ce que demain lui cache. Il est écœuré de se voir traire jusqu’au sang par l’avidité des sociétés que le gouvernement a lâchées sur lui. La dictature du capital, l’impérialisme de l’argent et la voracité insatiable des sociétés ont, de manière injuste, honteuse et dégradante, ruiné le peuple que le silence du gouvernement et sa complicité ont contribué à sa vulnérabilité d’abord, puis à sa précarité et à sa misère enfin.

Puis une nouvelle forme de manifestations est apparue. Les forces vives du peuple, en l’occurrence les jeunes, la promesse du changement, les piliers de l’avenir, ont enfin retenu la leçon. Il ne sert à rien d’aller hurler les revendications du peuple par les rues et sur les places publiques pour qu’en fin de compte le gouvernement vous envoie dessus les forces de répression pour vous tabasser. En outre, le gouvernement a depuis longtemps jeté l’éponge au profit des sociétés qui doivent se délecter des bénéfices incalculables qu’ils tirent du monopole de leurs produits au détriment du peuple qui s’enfonce de plus en plus dans les affres de la pauvreté. Pour toutes ces raisons, et pour bien d’autres, les brigades électroniques ont pris les choses en main. Leur mot d’ordre : le boycott ; leur arme : le clavier ; leur cible : trois sociétés ; leur objectif : faire baisser les prix. Au début de cette campagne, personne n’y croyait, ni les responsables des trois sociétés, ni les ministres composant le gouvernement, ni les députés, ni même une partie du peuple à qui il a été ingurgité la soumission et la résignation comme une fatalité. Mais peu à peu, le peuple, avec toutes ses composantes, a commencé à adhérer au boycott, et petit à petit ses effets ont, quant à eux, commencé à se ressentir sur les sociétés boycottées. Le bras de fer oppose directement le peuple aux sociétés visées, sans intermédiaires, sans entre-deux, sans forces d’interposition. Le combat se révèle inégale et la force du nombre prend le dessus sur celle du capital, la force de celui qui n’a rien à perdre sur celui qui a beaucoup à perdre, la force boycotteur sur celle boycotté. Chacun campe sur ses positions jusqu’à l’intervention maladroite de quelques ministres et députés qui se sont rangés aux côtés des sociétés contre la volonté du peuple. L’un d’entre eux est déjà tombé pour avoir mal choisi son camp. Cet autre qui a juré par tous les saints que même si toutes les brigades électroniques du monde se ligueront contre lui, cela ne le fera pas revenir sur sa parole, et cet autre qui a traité les boycotteurs d’étourdis, attendent un tremblement qui viendra de si haut pour les faire tomber, avec un ‘’plouf !’’ comme un fruit blet !

Qui peut donc faire arrêter le boycott ?

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1 Comment

  1. شي مدوخ
    09/06/2018 at 06:48

    « Qui peut arrêter le boycott ? »
    Le chef de l’État, en mettant terme au monopole illégitime et en assurant libre cours à la compétition libre, seule capable de garantir un bon rapport qualité- prix. En d’autres termes, on doit finir avec l’économie de rente fortement encouragée par le ‘mariage’ de l’argent et de la politique. Désormais, La stabilité du pays même en suit

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